Échanges sur les guerres de Vendée

Tous les sujets relatifs aux guerres de la Révolution et de l'Empire (1792-1815) ont leur place ici. Le but est qu'il en soit débattu de manière sérieuse, voire studieuse. Les questions amenant des développements importants ou nouveaux pourront voir ces derniers se transformer en articles "permanents" sur le site.

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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 03 Mar 2020, 18:20

DB le 13/02/2020

Les hussards de la Liberté

La création des hussards de la Liberté date du 2 septembre 1792 suite à la proposition dans la semaine précédente des citoyens Dumont et Rutteau qui virent sans doute là une bonne occasion de s’enrichir. Les hussards de la Liberté prirent la forme de deux corps distincts de la taille chacun d’un régiment à 8 compagnies de 60 h.

Le 1er corps partit à l’armée des Vosges et s’y fit remarquer par son état de délabrement et de désordre tels qu’il a fallu destituer son chef de corps Rutteau via un procès avant de le réorganiser. Le 1er mai 1794, il « rentra dans le rang » et devint le 7ème bis de hussards.

Le 2ème corps fut envoyé à l’Armée du Nord et y connut un destin à peine plus glorieux dans ses débuts que son alter ego sauf que pour celui-ci, ce furent les hussards qui, en février 1793, se rebellèrent contre leur chef (Dumont). L’unité, réduite à un seul escadron, fut dissoute par Dumouriez avant d’être très peu de temps après reformée sous le titre de 9ème de hussards. Enfin, pas immédiatement.

En effet, par un mystère peu intéressant à élucider ici, il porta tout d’abord le numéro 8 (ses guidons conservèrent ce numéro jusqu’en 1796, faut pas gâcher) comme les hussards de Lamothe. Alors, pour ne pas les confondre, il devint le numéro 10. Mais le numéro 4 ayant passé en entier à l’ennemi en juin 1793, tous les régiments de hussards virent leur numéro d’ordre diminuer de 1. Notre régiment prit alors le numéro 9 dans l’arme.

Ce qui est délicat dans ces changements de numéros, c’est qu’il y a toujours un doute quand dans un ordre de bataille ou un récit, est cité le régiment considéré, puisque tous peuvent être connus par 2 numéros, notamment dans cette période de transition.

Mi-juin 1793, il est en Vendée avec un effectif de 630 h (OdB du 21 juin) faisant de lui la plus nombreuse unité de cavalerie de l’armée. C’est là qu’il cède un escadron au futur 11ème de hussards (127 h d’après les sources, expliquant son effectif de 470 h au 16 septembre).

... à suivre...
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 15 Mar 2020, 15:11

DB le 13/02/2020

Cavaliers jacobins et cavalerie révolutionnaire

Dans la mesure où l’historique du 11ème hussards ne comptabilise que 8 h issus de ces formations, on peut aisément les considérer comme insignifiantes et donc particulièrement à connaître. Sans doute s’agit-il de volontaires ou de gardes nationaux de quelques villes des bords de Loire (Tours ou Saumur).

Le 11ème hussards en Vendée

Toujours d’après son historique, le régiment semble réparti en plusieurs détachements : Luçon et Chantonnay, Saumur et Doué.

Il participe aux deux batailles de Luçon (30 juillet et 14 août), certainement à Chantonnay (5 septembre) puis à la Tremblaie (15 octobre) et Cholet (17 octobre). Ce détachement est de la taille d’un escadron : l’ordre de bataille du 6 juillet de la division de Niort mentionne 78 h pour les dragons de la Liberté (ancien nom de la Légion germanique, donc du 11ème de hussards).

L’autre détachement opère depuis Saumur. Il participe au combat pour Doué en septembre et est ensuite avec Westermann pour soutenir l’entrée en campagne de l’Armée de Mayence. On les retrouve en octobre à la bataille de Chatillon, toujours avec Westermann où il se serait emparé de la caisse de l’armée royaliste (fait intéressant à creuser un peu plus tard). L’effectif de ce dernier serait de l’ordre de 2 escadrons (après le départ d’une partie du régiment, il reste donc entre 300 h et 400 h en Vendée, tous n’étant pas forcément disponibles sous les armes et/ou montés).

Après Cholet, il reste au Sud de la Loire. On retrouve un détachement aux Ponts de Cé en décembre, qui participe à la défense d’Ancenis suite à la retraite de l’armée royale après la défaite du Mans.
A partir de janvier, il participe aux colonnes infernales.

Précisions complémentaires

En Vendée, en 1793, opèrent le 8ème de hussards (ex-éclaireurs de Fabrefonds) et les 9ème et 11ème. Puis vint un peu plus tard le 7ème avec 2 escadrons (ces derniers furent versés en 1795 dans le 7ème bis).

Jacques Philippe Avice (1759-1825) fut le colonel du 11ème hussards de sa création à 1803, date à laquelle il est dissous pour devenir le 29ème dragons (et plus tard le 6ème chevau légers). Toutefois, il fut à deux reprises suspendu de ses fonctions en 1794 et 1797 pour des périodes d’environ deux ans (sans doute suite à des dénonciations politiques) et sera suppléé par des chefs d’escadron. Il était précédemment chef d’escadron au 9ème hussards. Il poursuivra sa carrière sous l’Empire (dragons), sera général de brigade en 1811 puis général de division en 1813.

Uniforme

L’uniforme à cette époque est dans les grandes lignes le suivant : culotte hongroise bleu ciel, dolman vert à col et revers rouges, pas de pelisse, pas de ceinture, mirliton à flamme rouge. Les trompettes semblent avoir un dolman rouge, col, revers et flamme bleue.

Ainsi, Rossignol, le 10 septembre, se plaint auprès de Duhoux de l’habillement du 11ème de hussards car ses couleurs se confondent avec celles des « brigands » et lui demande d’en changer, chose qui ne sera point faite.

Pour aller plus loin, principales sources. 

·        Historique du 11ème régiment de hussards, Lt de Lassus, 1890 (disponible sur Gallica, j’ai subi moult échecs avant de réussir à le télécharger). Document essentiel.

·        La légion germanique (1792-1793), A. Chuquet, 1904.

·        Projet de création de deux corps de hussards de la liberté, composés de citoyens aguerris et intrépides, destinés à servir aux postes avancés de l'ennemi par L. Rutteau et L.-V. Dumont. 1792.
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 25 Mai 2020, 10:17

Denis Bouttet est de retour avec une série sur les légions en Vendée

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Légions et autres corps francs en Vendée

A l’heure où la République, engagée dans une guerre qui n’allait réellement prendre fin que vingt-trois ans plus tard, appelait aux armes et au salut de la Patrie, fut décrétée la création de plusieurs légions parmi un nombre croissant de nouvelles unités de tous types.

La genèse de tels corps, constitués généralement d’infanterie et de cavalerie, est déjà ancienne, puisqu’elle remonte au 1er mars 1763 lorsque les différentes troupes légères furent regroupées et réorganisées en sept légions (Royale, Flandre, Hainaut, Lorraine, Condé, Soubise, Conflans). Ces unités, dissoutes en 1776, formeront à l’époque l’ossature des régiments de chasseurs à cheval et des bataillons d’infanterie légère existants à l’aube de la Révolution.

Les périodes de guerre sont propices à la levée de nouvelles unités et de corps francs, aussi ne faut-il point s’étonner que dès mai 1792, des formations quelque peu baroques voient le jour avant de disparaître progressivement à partir de 1793, intégrant à nouveau des formations d’infanterie légère et de chasseurs à cheval (en application du décret du 21 février 1793 *).

* Les 21, 23, 24 et 25 février 1793 furent émis plusieurs décrets d’importance sur l’organisation de l’armée (création des demi-brigades, des grades de général de brigade et de division, suppression des légions, etc...). Celui que l’Histoire retiendra est celui du 24 février qui prévoit la fameuse levée de 300.000 hommes, étincelle pour l’éclatement des troubles en Vendée. Le rapport de Dubois-Crancé est en partie à l’origine de ces réformes.

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Le présent travail constitue une simple synthèse de la contribution de telles unités engagées au second semestre 1793 contre l’insurrection vendéenne.

Réglementations
La réforme de février 1793 réorganise l’armée d’une part en cherchant à homogénéiser et standardiser les unités (création des demi-brigades en particulier) et, d’autre part, en permettant l’accroissement des forces en vue de quasiment doubler les effectifs (levée des 300.000 hommes).
Concernant les légions existantes, deux articles en scellent le sort.

Article 3, titre III sur la cavalerie légère : « Il sera formé de la cavalerie de toutes les légions qui sont au service de la république, ainsi que des corps francs à cheval ; huit nouveaux régiments de chasseurs à cheval, sur le même pied, le même uniforme que les douze régiments qui existent, et à la même paye ; mais les individus qui composeront ces nouveaux corps, n’en prendront l’uniforme qu’à mesure qu’on sera obligé de renouveler leur habillement et équipement. Le ministre est chargé d’opérer cette formation dans le court délai, et d’en rendre compte à la Convention. Après la nouvelle organisation de la cavalerie légère consommée, l’avancement aux grades militaires aura lieu dans ces corps dans la même forme qui a été indiquée pour l’infanterie, sans déroger néanmoins aux lois concernant les troupes légères, pour tout ce qui n’a point de rapport au présent décret. »
Le fait que les uniformes aient pris du temps à être renouvelés explique l’identification de certaines unités dissoutes dans les récits des témoins de l’époque (hussards de la mort, légion de Rosenthal, etc...).

Article 1 du titre IV (infanterie légère) : « les 14 bataillons d’infanterie légère recevront la même formation que l’infanterie de ligne, en conséquence, le ministre de la guerre formera en bataillons les corps francs à pied et les troupes d’infanterie des légions, et il fera l’incorporation de deux de ces bataillons avec un bataillon de chasseurs, par ordre de numéros. Trois bataillons ainsi réunis formeront une demi-brigade d’infanterie légère, qui aura la même organisatrion et même paye que l’infanterie de ligne. Après la formation de ces demi-brigades, elles jouiront du même mode d’avancement que l’infanterie de ligne. »

Toutefois, il eût été trop simple de s’en tenir là. Le décret du 10 mars 1793 concernant la cavalerie des légions, des corps francs à cheval, et les corps francs à pied, modifie « légèrement » les contours de la loi en vigueur : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités de défense générale et de la guerre réunis, décrète :

article 1. L’exécution des articles 3 du titre III, et I du titre IV de la loi sur l’organisation générale de l’armée, est provisoirement suspendue, seulement en ce qui concerne la réunion de la cavalerie des légions et des corps francs à cheval, en régiments de chasseurs à cheval, et la réunion des corps francs à pied, en bataillons d’infanterie légère.

article 2. Tous les corps de cavalerie et d’infanterie, actuellement existants, seront conservés et complétés ; jusqu’à ce complètement, il n’en sera plus créé de nouveaux ».

La suspension est due au tollé que cela a représenté au sein des armées dans les premiers jours qui suivirent sa publication alors que la situation aux frontières était critique pour les armes de la République. Toutefois, le mouvement de fond aura bien lieu mais prendra plus de temps sans doute que souhaité, il faudra tout de même deux amalgames pour y arriver.

Seule la légion nantaise sera créée postérieurement à ce décret, mais comme on le verra, il s’agit d’une unité un peu particulière. En revanche, la création de compagnies franches (à pied) continuera.

A suivre... La légion de Rosenthal (compagnie franche de la Liberté de Rosenthal).
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 29 Mai 2020, 16:24

Les légions en Vendée (par Denis Bouttet, mai 2020)

La légion de Rosenthal (compagnie franche de la Liberté de Rosenthal)

Bien que modeste, cette unité m’a donné pas mal de fil à retordre tant lacunes et incohérences laissaient place à interprétation. Comme souvent, il suffit de trouver la bonne source pour mettre fin au casse-tête. En l’occurrence, il s’agit de l’article de G. Loïc dans la Revue des questions historiques, livraison de juin 1933, édition de 1934, p37 (on peut le trouver sur Gallica). Le propos est certes très politisé mais il s’appuie sur une recherche historique assez complète. Je vais en reprendre les grandes lignes et compléter ce qui manque.

La compagnie franche de la Liberté de Rosenthal est créée suite au décret de l’Assemblée nationale du 12 septembre 1792. À l’instar de la légion germanique et de la légion des Allobroges, destinées à accueillir respectivement les Allemands et les Savoyards voulant servir la Patrie en danger, notre « légion » recrutera des volontaires de la vallée de Rosenthal, vallée entre l’Alsace et le territoire de Belfort, déjà célèbre pour sa porcelaine.

Elle est à la création composée de 237 chasseurs à pied et de 75 chasseurs à cheval. Elle sera levée et commandée par le citoyen D’Hingue. Celui-ci, de famille alsacienne, est un ancien officier de l’Ancien régime, entré dans l’armée en 1744, qui avait eu le même projet dix ans plus tôt. Les volontaires se présentèrent à la barrière d’Enfer à Paris.

La légion participa à plusieurs opérations de maintien de l’ordre :

-Lors de la journée du 21 janvier 1793, elle occupe le château de Bicêtre avec 2 pièces de canon servies par des artilleurs de la rue de l’Oursine (garde nationale de Paris),

-Le 27 janvier, elle participe à une vaste opération de police visant à arrêter des séditieux et tous les citoyens sans carte et sans asile,

-Elle participe en avril à la garde du Temple mais assez peu de temps car la vindicte populaire s’étonne de voir des étrangers garder la famille Royale,

-Lors de l’arrestation des députés girondins, le 2 juin, en occupant la place du Carrousel.

Initialement prévue pour rejoindre en partie le futur 14ème chasseurs à cheval, elle fut retenue dans la capitale sujette à de nombreux troubles, notamment par Santerre qui en commandait la garde nationale.

Suite à l’intervention du 19 mars à l’Assemblée de D’Hingue réclamant de « voler aux champs de bataille où le danger de la Patrie les appelle » et que son corps soit porté à 1000 hommes, elle fut envoyée à l’Armée des côtes de la Rochelle qui réclamait des troupes, et notamment la légion pour sa cavalerie.

Elle arrive à Tours le 14 avril avec 200 et quelques hommes sous les armes (infanterie et cavalerie). Toutefois, il reste à Paris quelques forces et le dépôt qui n’arriveront à Orléans que le 8 juillet (386 h et 348 chevaux).

En Vendée, la légion fit un effet déplorable dès le début. Leygonier qui commande alors à Saumur déclare : « Je n’ai reçu en secours que la légion de Rosenthal, formant en tout 200 hommes, livrée à l’insubordination dès son arrivée. Elle réclame des armes, des décomptes et plusieurs parties d’équipement. » ; de rajouter « Le détachement de Rosenthal (…) a débuté par une insurrection et par déserter le même jour en totalité le poste de Montreuil, se repliant à toute bride sur Saumur où il a jeté l’alarme, en annonçant l’arrivée de l’ennemi » et pour conclure « La composition et l’esprit de la légion de Rosenthal ne me permettent pas d’en attendre un service utile, j’ai été sur le point de la faire désarmer ».

Bref, c’est une unité sans expérience de la guerre (finalement ce n’est à cette époque qu’une unité de garde nationale) , mal équipée et très certainement mal commandée qui arrive à l’armée. Ceci explique sans doute pourquoi, elle fut assez rapidement dissoute (le 28 juin), son infanterie étant versée alors dans le 22ème régiment d’infanterie légère (évoqué dans un message précédent) et sa cavalerie dans le futur 19ème chasseurs à cheval.

Avec le 22ème régiment d’infanterie, elle opérera au sein de la division de Saumur (au sein de l’avant-garde).

Du 19ème chasseurs, seul le 1er escadron opérera en Vendée, gardant le titre de légion de Rosenthal, et sera affecté à la division de Niort. Il sera de quasiment tous les combats avec Westermann et ne rejoindra les autres escadrons qu'en juin 1794.

Dans l’ordre de bataille de la division de Niort du 26 juin (sans doute un prochain article), elle représente une force de 70 fantassins et 67 cavaliers.

Les autres escadrons du 19ème chasseurs formés à Orléans partiront pour une part à l’Armée du Rhin et pour un autre escadron à l’Armée des Pyrénées Orientales.

Les officiers de cette légion ne firent pas de carrière brillante sous les armes. D’Hingue, chef de brigade du 19ème chasseurs, fut démis et mourut en 1794, Biot qui le remplaça fut réformé pour blessure invalidante.
Toutefois, un personnage entra dans la légende : le lieutenant Follot (1750-1802 ?). Simple chasseur à cheval à la 2ème compagnie du 1er escadron, il devient sous-lieutenant sur le champ de bataille en l’an II (en Vendée donc), continue de se battre sous les armes avec le 19ème chasseurs avant de disparaitre des registres lors de l’expédition de St Domingue. Sa particularité ? Être une femme.

A suivre... La légion nationale des Américains et du Midi
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar BEYER Olivier sur 30 Mai 2020, 18:18

Trouvé sur le site du SHD

http://recherche-archives.vendee.fr/arc ... D085_SHD_B

A creuser dedans
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 30 Mai 2020, 21:15

Super trouvaille, Olivier.

Je viens justement de travailler sur deux OBs de l'Armée des Côtes de La Rochelle en juin 1793, en soutien du travail en cours de Denis Bouttet.

Je vois, parmi les pièces accessibles au lien du SHD communiqué, le détail de l'état-major de l'armée, ce qui enrichira en rapport l'OB en cours et aidera certainement notre ami pour le plus grand bénéfice de notre lectorat attentif.

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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 04 Juin 2020, 21:19

Suite sur "Les légions en Vendée" par Denis Bouttet

La légion nationale des américains et du midi

Parce qu’à l’époque on ne disait pas Antilles, cette légion porte un nom qui nous sonne étrangement à l’oreille aujourd’hui. Sa particularité est qu’elle est composée d’hommes de couleur (comme on disait à l’époque). Elle est créée suite au décret du 7 septembre 1792 sous forme d’un régiment de cavalerie à quatre escadrons de deux compagnies chacun, son infanterie n’ayant pu être recrutée. Elle est dirigée par le chevalier de Saint Georges, rendu célèbre pour ses talents d’escrimeur, de danseur et de musicien.

Seules sept compagnies seront formées initialement. Le 6 décembre 1792, il devient le 13ème régiment de chasseurs à cheval et St George en est son premier chef de brigade, bien que dans les faits ce soit Dumas qui assure le commandement opérationnel (visiblement l’entente entre les deux hommes n’était pas forcément cordiale). Basée à Lille, son état n’inspire pas confiance et elle sera assez peu employée dans les premiers mois de 1793.

Le premier escadron qui regroupe l’essentiel des hommes de couleur est destiné à constituer une unité de gendarmerie à Saint-Domingue. Il est envoyé à Brest pour embarquer. Il part de son dépôt le 27 avril. Toutefois, en chemin, il sera détourné vers la Vendée. Cet escadron prendra alors le nom de hussards américains, il est dirigé par le chef d’escadron (3) Isaac Bazonga. Il représente une force de 73 hommes à son départ.

Le 13ème chasseur à cheval continuera sa carrière principalement à l’Armée du Nord et se verra renforcé en janvier 1795 par le 13ème bis de chasseurs à cheval notamment mais également par les dragons de la Manche. A noter qu’au cours de l’année 1795, les cadres de couleur seront quasiment tous écartés.

Les hussards américains rejoindront l’Armée des Côtes de la Rochelle à Nantes. Ils y resteront jusqu’en avril 1794 où il rejoindront le 13ème bis de chasseurs à cheval puis le 13ème (la boucle est bouclée).

En Vendée, ils surent se faire craindre des insurgés. Ils restèrent la plupart du temps aux alentours de Nantes et ne participèrent pas à la virée de Galerne (sauf à la toute fin, dans la poursuite des survivants de Savenay).

Quelques personnalités associées à cette unité :

Joseph Bologne de Saint Georges (1745-1799), escrimeur de renom,

Thomas Alexandre Davy de la Pailleterie, dit Dumas (1762-1806), inspirateur originel du roman "Le comte de Monte Cristo", père du célèbre romancier,

Jean Michel Josset de Saint Ange ( ?), escroc (4).

------------

3) En 1793, on utilisait plus aisément le grade de lieutenant-colonel.

4) Le personnage est pour le moins haut en couleurs : agent principal de Santerre pour ses manœuvres secrètes, tenancier d’une maison de jeu au Palais Royal, probablement "maquereau" (souteneur), ami de St Georges, échappe de justesse à l’échafaud (mais pas son frère, tout aussi fréquentable que lui), membre de "la bande noire" (nébuleuse de spéculateurs sur les biens nationaux).

... à suivre ... La légion germanique
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 07 Juin 2020, 16:38

Comme les compliments sont un peu plus rares que les critiques et beaucoup plus que le silence, je me fais un devoir de communiquer ici ceux de Thomas Tétard, correspondant friand d'ordres de batailles et de Livrets L3C, et qui s'avère aussi lecteur assidu de Planète Napoléon, et en l'occurrence de nos Échanges sur les guerres de Vendée :

TT => DM

J'ai beaucoup apprécié les "échanges sur les guerres de Vendée", c'est en lisant ces messages que l'on se rend vraiment compte du travail de recherche ! C'est impressionnant la quantité d'informations que l'on peut finalement retrouver.

DM => TT

Oui, et ce n'est pas fini. Denis persiste. Tu as dû voir le lancement d'un nouveau "feuilleton" sur les légions en Vendée, qui sera suivi d'une étude non moins détaillée de l'Armée des Côtes de la Rochelle, pour laquelle, avec Thierry Legrand, je soutiens la démarche de "mise au clair" de l'ordre de bataille.

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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 10 Juin 2020, 16:53

Suite sur "Les légions en Vendée" par Denis Bouttet

La légion germanique

Une première présentation de cette unité a été faite lors de l’article sur le 11ème hussards. Comme son nom l’indique, elle était composée au départ de germanophones (Suisses, Allemands).

Dissoute peu de temps après son arrivée en Vendée suite à la défaite de Saumur, son infanterie et artillerie furent versées dans le 22ème régiment d’infanterie légère, et sa cavalerie dans le 11ème de hussards.
Une partie rejoindra également les rangs vendéens et formera l’ossature de la compagnie suisse.

Pour aller plus loin, se pencher sur "La légion germanique (1792-1793)", par Arthur Chuquet, 1904.

Précision : l’armée de l’Ancien régime comportait 9 régiments suisses plus les gardes suisses.
Tous ces régiments ont été licenciés en 1792 mais leurs soldats furent autorisés à servir la France. Aussi n’est-il point étonnant de les retrouver en masse dans la Légion germanique.

... À suivre ... La légion du nord
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 16 Juin 2020, 10:25

Suite sur "Les légions en Vendée", par Denis Bouttet

La légion du Nord

La loi du 31 mai 1792 autorise la création de trois légions (Moselle, Nord et Centre) constituées chacune de 26 compagnies dont 18 d’infanterie regroupées en deux bataillons et 8 de cavalerie en deux escadrons. La légion du Nord, également appelée Légion de Lafayette, dispose à l’inverse des autres « légions sœurs » d’une compagnie d’artillerie légère (artillerie à cheval). C’est donc une troupe expérimentée qui arrive début juin 1793 en Vendée. Elle est alors sous les ordres de Westermann (qui n’a pas servi dans ses rangs) et fera avec lui une grande partie de la campagne de 1793.

Peu de jours après son arrivée à la division de Niort (à Saint-Maixent, le 20 juin) elle signe un premier succès le 25 juin en reprenant Parthenay, succès qui sera amplifié pour faire contrepoids à la perte de Saumur et à la menace pesant sur Nantes. Westermann l’utilise dès lors pour mener moultes représailles et destructions, lui offrant au passage une sinistre réputation et probablement des habitudes de pillage qui la feront détester de la population.

Le 6 juillet, à Chatillon, Westermann et la légion se feront surprendre et mettre en déroute, perdant au passage toute son artillerie. Voici un extrait assez évocateur de la déclaration de Jean-Pierre Colson, premier canonnier à la compagnie d’artillerie à cheval (Capitaine Lataille) suite au combat de Chatillon :

« … vers les onze heures et demie du matin, ils ont été surpris par deux coups de canon à boulet par l’armée des Rebelles, qui s’était approchée de leur bivouac sans que les postes avancés s’en aperçurent, que cette surprise ayant causé une alarme générale dans le camp, les deux compagnies d’artillerie volantes se sont réunies à l’instant à leur pièces et que pendant une heure, ils n’ont cessé de faire un feu suivi et continuel, observe le déclarant, que n’ayant aucun moyen de retraite sur la hauteur qu’ils occupèrent, et étant entourés de toutes parts de brigands, et ayant un terrain couvert de grains prêt à couper, et étant obligé de manœuvrer dans ce champ, le feu a pris dans les grains qui les entouraient, que l’incendie faisant un progrès rapide, n’ayant plus d’ailleurs de moyen de défense, voyant l’instant où le feu allait gagner leur caisson, et les faire sauter, se trouvant d’ailleurs assaillis par une mousqueterie qui ne cessait de faire un feu continuel, ils ont cherché à faire leur retraite, mais que ne pouvant la faire que par une descente très rapide, le premier caisson s’est culbuté avec les chevaux et le charretier du haut en bas de la montagne a sauté et est tombée dans un étang, d’autres pièces ont eu le même sort et le surplus a été abandonné sur le terrain par les canonniers qui se trouvant entourés de l’incendie des blés ont été obligés de se sauver, beaucoup ont péri sur la place ou ils y ont brûlé, y étant retenus par les blessures qu’ils y avaient reçues… ».

Cette défaite vaudra alors à Westermann la perte de son commandement mais surtout de devoir s’expliquer devant la Convention suite à l’accusation des représentants en mission Bourdon et Goupilleau (5). Grâce à ses solides appuis (Danton) mais surtout en accusant (à tort) le lieutenant-colonel Caire (6) commandant l’infanterie de la légion du Nord, il sauvera sa tête mais ne retrouvera du service que lors de l’offensive d’octobre où son zèle lui permettra de « briller » à nouveau.

La légion du Nord sera employée en Vendée pendant toute l’année 1793 au sein de la division de Niort. Il fut un temps question d’envoyer une partie de son infanterie à Rochefort (1 bataillon de 400 h) pour les colonies mais il n’en fut rien. Le corps eut un niveau d’engagement assez important pendant le second semestre 1793, et de ce fait, subit une érosion logique de ses effectifs :

Environ 1200 h (toutes armes confondues) à son arrivée en juin (d’après Westermann)

1130 h d’infanterie et 385 de cavalerie à la division de Niort le 26 juin (7),

636 h (infanterie et cavalerie) en février 1794.

A noter que le décret du 10 juillet 1793 précise que la cavalerie sera formée sur le modèle des chasseurs à cheval et l’infanterie suivant celui de l’infanterie légère. Fin mars 1794, l’infanterie fut versée dans le 19ème bis bataillon de chasseurs (qui fut amalgamé ensuite à la 53ème demi brigade de seconde formation) et la cavalerie fut majoritairement intégrée au 19ème dragons mais également au 16ème dragons et au 13ème chasseurs à cheval.

Quelques personnalités passées par cette unité :

Dominique Joba (1759-1809), général de brigade,

François Félix Vignes (1769-1799), général de brigade,

Pierre Poinsot de Chansac (1764-1833), général de brigade puis lieutenant général à la Restauration,

Cyrille Simon Picquet (1774-1847), général de brigade puis lieutenant général à la Restauration,

Charles Pierre Schweisguth (1769-1847), commandant d’armes, héroïque défenseur de Sélestat en 1814.

Notes

5) La défaite provient d’un manque élémentaire de reconnaissances, faute que les représentants ne veulent couvrir compte tenu de la tension qui règne à ce moment au sein de l’armée.

6) Sous prétexte de trahison car noble et ancien page du comte d’Artois (futur Charles X), titre qui lui donnait accès à l’armée comme officier. Charles Henry Jules François Marie de Caire (1770-1840) fut acquitté le 30 juillet. Noble il dût démissionner mais put reprendre du service en 1795, tout d’abord dans la gendarmerie puis comme inspecteur aux revues de 1800 à 1814.

7) A noter que l’état de situation de la division de Saumur du 21 juin présente au sein de son avant-garde un détachement de la légion du Nord fort de 64 fantassins, 36 cavaliers et 2 pièces.

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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 25 Juin 2020, 13:55

Suite sur "Les légions en Vendée" par Denis Bouttet

La légion des Ardennes

On trouve également trace en Vendée de cette légion au cours du 2ème semestre 1793, ou tout du moins de son 2ème bataillon. Ce fut une surprise pour moi d’en découvrir la présence, très discrète, sur ce théâtre d’opérations.

Elle fut créée le 13 juillet 1792 par Dumouriez à partir de différentes compagnies franches présentes à l’Armée des Ardennes. Confirmée en décembre 1792 par la Convention, elle est alors constituée de deux bataillons d’infanterie légère et de quatre escadrons de cavalerie et, est dès lors, considérée comme «régulière» (i.e. «solide»).

Chaque bataillon est à neuf compagnies dont une de grenadiers. Le premier prendra le nom de grenadiers et le second, celui de chasseurs.

Ce dernier arriva en Vendée fin mai 1793 avec un effectif d’environ 200 h et fut affecté à l’Armée des Côtes de la Rochelle. On le retrouve aussi sous le nom de 2ème bataillon de chasseurs des Ardennes. Porté à 310 h le 2 novembre, on le retrouve principalement dans les garnisons de Tours et de Saumur et ce jusqu’en février 1794. Il fut probablement versé dans le 15ème bis d’infanterie légère et lors du 2ème amalgame, dans la 30ème demi brigade d’infanterie légère. (8)

Peu de faits d’armes en Vendée si ce n’est lors de l’offensive menée par Westermann sur Parthenay fin juin 1793 et sa déroute à Bressuire début juillet où un détachement (52 h) combattit aux côtés de la Légion du Nord.

Quelques personnalités passées par la légion des Ardennes :

Pierre Margaron (1765-1824), général de division,

Etienne Nicolas Le Fol (1764-1840), général de division,

Joseph de Hédouville (9) (1744-1818), général de brigade

Antoine Louis Decrest de Saint-Germain (1761-1835), général de division,

Marie Adrien François Guiton (1761-1819), général de brigade.


Notes (le smiley juste ci-dessous est en fait le chiffre 8 pour la note n° 8 !)

8) Pour information, le 1er bataillon fut amalgamé à la 23ème demi-brigade de 1ère formation et la cavalerie versée dans le 23ème chasseurs à cheval.

9) Le personnage est romanesque : surnommé « le débraillé », cousin du général comte Gabriel de Hédouville (1755-1825), pacificateur de l’Ouest. Marié quatre fois, traduit devant le tribunal révolutionnaire pour trahison et acquitté, commandant en chef de la garde nationale de Vitry-le-François, il réussit à enrôler à sa suite ses deux frères dans la légion des Ardennes : François Pierre (1752-1815) au 1er bataillon et Pierre Gabriel (1755-1821) au second. Ce qui a rendu la recherche compliquée, c’est la quantité de membres (dont beaucoup de militaires) que comporte la famille Hédouville.

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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 02 Juil 2020, 15:22

Suite sur "Les légions en Vendée" par Denis Bouttet

La légion des Francs
Si pendant la période qui nous occupe, les compagnies franches sont légions, il en est presque de même pour les légions des francs puisque plusieurs porteront ce nom à différentes périodes.
Celle qui nous intéresse est celle qui fut formée à Mayence, pendant le siège, le 20 mai 1793 à partir de volontaires issus des autres bataillons de la garnison. Elle est commandée par Jean Fortuné Bouïn de Marigny (1766-1793), futur général de brigade.

Cette légion comprend un bataillon d’infanterie légère à six compagnies et un escadron de cavalerie.
Elle s’illustra pendant les guerres de Vendée. Le 24 août 1795, elle forma à Rennes avec des compagnies franches de Coulommiers, les chasseurs de Soldberg et des volontaires de Brest, une nouvelle légion des Francs à trois bataillons qui intégrera en 1796 la 24ème demi-brigade d’infanterie légère. Sa cavalerie rejoignit dès 1794 le 19ème dragon (avec la légion du Nord).


Autres unités légères notables
Il me semblait important de profiter de ce travail pour mettre en exergue quelques unités supplémentaires, non connues sous le terme de légion, mais relativement similaires et suffisamment intéressantes pour que l’on s’y attarde un peu.

Chasseurs de Cassel
Cette unité reste indissociable de la légion des Francs puisqu’elles ont le plus souvent agit de conserve, tout du moins en 1793.

Le bataillon fut également formé à Mayence avec des unités et des volontaires de la garnison. La première structure fut créée en avril 1793 à cinq compagnies à partir de volontaires plusieurs bataillons, savoir :

la première à partir du 7ème bataillon d’infanterie légère,
la seconde à partir du I/57ème de ligne,
la 3ème à partir du II/57ème de ligne et du 3ème du Jura,
la 4ème à partir du 82ème de ligne
la 5ème à partir du 1er des fédérés et du 10ème de la Meurthe).

En mai, il fut complété pour former le 16ème bataillon d’infanterie légère (on le retrouve sous ces 2 appellations, expliquant certaines ambiguïtés dans les ordres de bataille) par adjonction de nouveaux volontaires dont une grande partie du 1er bataillon de chasseurs de la République (Paris) (10). Il est certainement organisé en neuf compagnies.

Il ne fut amalgamé qu’en 1796 et rejoignit la 24ème demi-brigade d’infanterie légère.
6ème bataillon des chasseurs francs du Nord.

La menace des forces de la Première coalition sur la frontière nord a engendré une très forte mobilisation locale. Cela s’est traduit par la création d’une multitude de compagnies franches. Dumouriez s’est employé, dès septembre 1792, à les rassembler sous forme de bataillons. C’est ainsi que sont créés les six bataillons francs du Nord par amalgames successifs de ces compagnies.

Notre bataillon est le dernier de la série et est constitué le 19 avril 1793 avec le bataillon des Flanqueurs d’Hasnon, une compagnie de chasseurs de Paris et la compagnie franche de Valenciennes. Il est très certainement organisé en neuf compagnies.

A noter que le bataillon des Flanqueurs d’Hasnon est lui-même constitué de la garde nationale de la commune du même nom (11) mais également de compagnies franches de Valenciennes, de Raismes et d’Ibart.

Le 6ème bataillon franc du Nord a dû arriver en juillet à l’Armée des Côtes de la Rochelle (première trace dans un ordre de bataille de la division de Saumur du 24 juillet) et y est resté jusqu’en juin 1794. Il fut probablement amalgamé à la 16ème demi-brigade légère bis.

Chasseurs de Bardon
La compagnie franche de Bardon fut formée en octobre 1792 avec un effectif relativement important (environ 300 h) recruté dans les départements de l’Ouest (Maine et Loire, Indre et Loire, Sarthe). En mars 1793, la compagnie deviendra un bataillon à quatre compagnies et son chef, A. Bardon (12), lieutenant-colonel. Le bataillon sera envoyé pour lutter contre l’insurrection de Vendée à partir de mai.
Le 23 juin, il forma à Tours avec le bataillon des chasseurs de la Manche, la compagnie franche de Saône)-et-Loire et le 31ème bataillon des réserves (ou volontaires de Soissons), le 23ème régiment d’infanterie légère (à deux bataillons de neuf compagnies), qui lors du second amalgame (1796) rejoindra la 13ème demi brigade d’infanterie légère.

Notes

10) Expliquant en partie ses faibles effectifs ultérieurs.

11) Le 3 février 1793, la Convention nationale décrète que la commune d’Hasnon (à proximité de Valenciennes) a bien mérité de la Patrie (suite à sa défense héroïque) et qu’elle peut augmenter les effectifs de sa garde nationale qui portera désormais le nom de Flanqueurs d’Hasnon.

12) Sera tué le 30 mars 1794 d’une balle en pleine tête.

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... À suivre... La légion nantaise
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 14 Juil 2020, 15:46

Suite sur "Les légions en Vendée" par Denis Bouttet

La légion nantaise

De création plus tardive, la légion nantaise est un cas particulier dans la mesure où, issue de la garde nationale de Nantes, son appartenance au corps des troupes légères n’est pas évidente. Pour bien comprendre la genèse de cette unité, il nous faut replonger à Nantes au mois de juin 1793.

L’Armée des Côtes de la Rochelle est battue à Saumur (le 9 juin) et s’est repliée sur Tours, incapable d’apporter le moindre soutien à Nantes qui, sans nul doute, est la prochaine cible des Vendéens. Nantes est seule et sa population le sait, d’autant que la ville ne dispose d’aucune fortification, hormis celles que sa géographie lui offre (la Loire et l’Erdre). Elle dispose des forces de l’Armée des Côtes de Brest de Canclaux et une garde nationale assez nombreuse. C’est, dans l’effervescence d’une ville menacée, qu’est créée le 17 juin la légion nantaise par Coustard de Massi, député girondin proscrit (comme tous les autres), et réfugié à Nantes.

Les tensions politiques n’épargnent pas Nantes et sa garde nationale, composée en majorité d’ouvriers et d’artisans. La légion nantaise fut alors qualifiée de girondine car nombre de ses membres sont issus de la bourgeoisie. C’est ainsi que Meuris, chef du 3ème bataillon de volontaires de la Loire Inférieure (13), héros de la résistance nantaise lors de l’attaque de la ville, fut tué en duel par le capitaine Nourrit de la légion nantaise suite à une querelle obscure (14).

Le choix du nom n’est sans doute pas anodin puisqu’au sein de la garde nationale tout est légion. En effet, avec le soulèvement populaire suite à la prise des Tuileries, la garde nationale de Nantes a vu ses effectifs gonfler au point qu’elle s’organise en cette fin d’année 1792 en pas moins de seize bataillons de quartier répartis en deux légions, la légion d’Occident et celle d’Orient.

Le tableau suivant* en décrit la force au 10 août 1793 (15). La garde nationale est alors à son apogée. Merlin de Thionville se chargea d’en réduire par la suite la force, histoire qu’elle ne pèse pas trop dans les troubles en cours (16) et que ce vivier d’hommes puisse pour partie servir à l’armée. Ainsi, l’état de la garnison de Nantes du 15 novembre 1793 mentionne une garde nationale réduite à 5454 h. Début 1794, elle ne sera plus que de 1600 h. Autre remarque, une grande partie de ces hommes n'est probablement pas armée (tout du moins de fusils).

* Qui sera mel la prochaine fois avec la deuxième partie sur la légion nantaise (NDLR).

Notes

13) Le 3ème bataillon de la Loire Inférieure fut créé le 15 mars 1793 exclusivement à partir de volontaires nantais tirés de la garde nationale. Dans les premiers jours, le bataillon fut considéré comme deux « demi-bataillons », le bataillon Meuris et le bataillon Martin, chacun à quatre compagnie de fusiliers et une de grenadiers.

14) La légion nantaise serait pro-Beysser alors que le bataillon Meuris anti-Beysser.

15) Commune et milice de Nantes, Camille Mellinet, 1840, volume 8.

16) Sans doute se rappelle-t-il les épisodes parisiens des mois précédents.

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... À suivre... La légion nantaise (2)
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 07 Aoû 2020, 10:24

Suite sur Les légions en Vendée, par Denis Bouttet.

La légion nantaise (2/2)

Commandant de la Garde Nationale : Piter Deurbroucq

Légion d'Occident : Commandant Piter Deurbroucq
bataillon des Vétérans : 800 h
bataillon du Change : 612 h
bataillon du département : 575 h
bataillon de Scévola : 981 h
bataillon des Ponts : 1062 h
bataillon de la Liberté : 617 h
bataillon du Bouffay : 528 h
bataillon de Cincinnatus : 576 h

Marins volontaires : 237 h
Pompiers : 270 h
Cavalerie : 232 h

Légion d'Orient : Commandant l'Adjudant Général Guillemé
bataillon de l’Egalité : 580 h
bataillon de Chésine : 686 h
bataillon de la Fosse : 533 h
bataillon des Agriculteurs : 955 h
bataillon Cours du Peuple : 636 h
bataillon de Graslin : 518 h
bataillon de la Bourse : 508 h
bataillon de Buffon : 933 h

A cette époque, la légion nantaise attachée à l’Armée des Côtes de Brest représentait une force d’environ 600 hommes, son financement est alors provisoirement assuré par le Ministère de la Guerre et non par la Ville, bien qu’elle ne s’en éloigna guère.

Le combat inaugural de la légion fut celui de Louée le 20 juin, expédition de Beysser pour attaquer un des deux camps de base de la division du Loroux. Ce fut un échec, où elle perdit plusieurs de ses officiers dont son commandant, Coeslier. Elle donna également à la défense du camp des Naudières le 5 septembre. Par la suite elle refusa d’assurer la protection des récoltes et en conséquence faillit être dissoute. Elle fut dès lors cantonnée à garder les bords de Loire. Elle devient le 5 juillet 1794, le premier bataillon de Nantes mais conservera son titre plusieurs années durant.

On la retrouve en 1795 lors de l’expédition de Quiberon où elle fait partie de la colonne de renfort de Nantes. Elle eût le rôle important (au vu du nombre et de leur destin) de garder les prisonniers.

Elle fut incorporée le 13 novembre 1800 à la Légion de la Loire ainsi que le 1er bataillon du Finistère, des compagnies franches à pied et à cheval et autres compagnies isolées formées en vertu de la loi du 14 messidor. Cette légion participa à l’expédition de Saint-Domingue. A son retour, elle fut versée dans le 46ème de ligne.

En 1793, période qui nous intéresse, elle fut probablement organisée comme une unité de la garde nationale, soit à quatre compagnies de fusiliers et une de grenadiers.

Issues des rangs de la légion nantaise (mais plus probablement de la garde nationale), nous trouvons les personnalités suivantes :

Jean Gaspard Normand (1772-1813), général de brigade,
Marie Stanislas Prévost (1776-1831), général de brigade,
Pierre Cambronne (1770-1842), général de division.

Conclusion
Comme on a pu le constater, derrière le vocable se cachent des réalités fort différentes avec des unités aux aptitudes militaires extrêmement variables. De manière simpliste on peut les classifier en deux catégories :

Celles qui sont expérimentées et peuvent être considérées comme de véritables unités légères (légion du Nord, légion des Ardennes, hussards américains), voire même unités d’élite (Légion des Francs de Mayence).

Celles qui, par inexpérience de la guerre, ne sont que des corps de milice.

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À suivre par un autre sujet d'"Échanges sur les guerres de Vendée"...
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Re: Échanges sur les guerres de Vendée

Messagepar MANÉ Diégo sur 25 Aoû 2020, 16:39

Suite des textes proposés par Denis Bouttet...

Cette fois, parlant de la Gendarmerie !
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Puisque dans la majorité des relations laissées par les acteurs républicains, il est fait état de brigands (mais également de rebelles) pour désigner les forces insurrectionnelles de Vendée, il n’est donc pas étonnant que des forces de gendarmerie aient été mobilisées pour lutter contre ces menaces.

Evolution de la gendarmerie nationale jusqu’en 1793

La gendarmerie nationale a été créée le 16 février 1791 sur l’héritage de l’ancienne maréchaussée. Dès sa création, elle est placée sous l’autorité du Ministère de la Guerre et sa mission première est le maintien de l’ordre tant aux armées que dans les villes et les campagnes.

Elle est initialement composée de 28 divisions départementales, soit environ 1600 brigades de 5 hommes, et encadrée par un corps de 700 officiers. Une division est commandée par un colonel, elle couvre un territoire de trois départements à raison de 2 compagnies1 par départements (soit en moyenne 15 brigades par département), commandées par un lieutenant-colonel. Cas particuliers : la 28ème division, qui couvre un seul département (la Corse avec 24 brigades) et la 5ème division avec 4 départements.

En octobre 1791, sont constituées les 29ème (à cheval) et 30ème (à pied) divisions de gendarmerie à partir d’éléments de la garde nationale de Paris soldée2 et licenciée en août de la même année. Ces deux divisions partirent sur les frontières combattre comme troupes de ligne.

En août 1792 seront formées à partir d’éléments de la garde nationale de Paris plusieurs divisions de gendarmerie, à savoir :

la 31ème division (mixte), composée pour une grande partie d’anciens des Gardes françaises,
la 32ème division (à pied) qui s’illustrera à Hondschoote le 5 septembre 1793,
la 33ème division (à pied) issue des gardes des ports de Paris,
la 34ème division (à pied),
la 35ème division (à pied) dite « des Vainqueurs de la Bastille ».

Les lois des 12 et 16 août 1792, qui prévoyaient la création de deux divisions de gendarmerie à cheval pour l’Armée de Réserve (sous les numéros 31 et 32) à partir d’éléments issus de brigades départementales, furent remplacées par celle, plus conséquente, du 26 août 1792. En effet, cette dernière demande la réunion des brigades de gendarmerie en divers lieux de rassemblement (Chalons, Versailles, Fontainebleau) en vue de renforcer les armées, à raison de 4 gendarmes montés par brigade (Corse exceptée). Il fut ainsi formé 6 divisions de gendarmerie à cheval à 4 ou 5 escadrons (environ 1000 hommes par division) :

2 divisions à Versailles à partir des départements du « Grand Ouest » (Bretagne, Touraine, Aquitaine, Pyrénées, etc...)

2 divisions à Chalons/Marne à partir des départements du « Grand Nord » (Normandie, Pas de Calais, Champagne, Alsace, etc...),

2 divisions à Fontainebleau à partir des départements du « Grand Sud » (Roussillon, Provence, Lyonnais, Alpes, Bourgogne, Auvergne, etc...).

La création de ces divisions ne laisse dans les départements que le corps des officiers non mobilisés pour l’occasion (une centaine seulement seront appelés à servir dans ces formations) et un homme par brigade pour former et encadrer les remplaçants.

Une 36ème division de gendarmerie verra le jour le 27 février 1793 ainsi qu’une division dite « de la Vendée » en mai 1793.

Il convient également de noter l’existence de deux autres forces de gendarmerie :

la gendarmerie des tribunaux en charge des opérations de justice à Paris (prisons, transferts),
la gendarmerie dite « de la Convention » en charge de la sécurité de la représentation nationale.

Notes

1) Chaque compagnie est commandée par un capitaine et trois lieutenants.

2) Initialement composée à partir de Gardes françaises et d’autres unités de la Maison du Roi. Cette garde nationale commandée par La Fayette acquit une sinistre réputation comme repaire de royalistes « comploteurs ». Mais ce fut surtout la fusillade du champ de mars le 17 juillet 1791 qui scella son sort.

A suivre... La Gendarmerie à l'Armée des Côtes de La Rochelle
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