par MANÉ Diégo sur 09 Aoû 2025, 15:45
Ne voyant pas le "rapport préliminaire" du maréchal français qu'il m'avait adressé j'en conclus qu'il attendait que je le publie. Dont ' acte.
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Würzberg, le 29 juin 1813, 6 heures de relevée
Le Maréchal duc d’Heilsberg, Commandant-en-chef le Corps (dit) des Quatre Rois
au Maréchal Prince de Wagram, Major-Général de la Grande armée
Monseigneur,
Je vous adresse le rapport préliminaire sur la bataille qui vient de se tenir aujourd'hui autour de Würzberg.
J'attends encore les rapports détaillés de tous mes subordonnés mais je ne peux retarder la grande nouvelle que je veux vous faire parvenir : c'est une grande victoire !
L'ennemi voulait couper notre voie de communication Nord-Sud et s'emparer de nos magasins à Wuüzberg.
Mais il a trouvé une ligne de défense particulièrement efficace que nous avions positionnée la veille après avoir reconnu l'avancée des corps ennemis.
Depuis 6 heures ce matin, les puissantes divisions russes, au nord, autrichiennes, au centre, et prussiennes, au sud, se sont heurtées en vain sur nos positions en hauteur et bien défendues par notre artillerie.
La batterie de 12£ de la Garde a notablement contribué à décourager les velléités autrichiennes.
Devant nos excellentes dispositions, l'ennemi a subi de lourdes pertes avant de décider un premier retrait puis d'attendre, toujours sous le feu de nos pièces, une éventuelle contre-attaque de notre part.
En effet, une force ennemie se présentant au sud et inquiétant notre voie de communication a provoqué la destruction programmée des ponts de Kleindorf vers midi. En prévoyance du surgissement d'une force ennemie dans notre dos, je fis conserver nos réserves jusqu'à la fin de la journée, afin de parer à toute éventualité.
Mais je présumais des capacités de l'ennemi que nos bonnes dispositions avaient sans doute déjà démoralisé : à partir de 3 heures de relevée, il se désengagea du front des combats et fit retraite en bon ordre vers le Nord-Est d'où il était venu. Aucune poursuite n'eut lieu car cela aurait permis d'offrir à l'ennemi quelque heureux résultat sur un combat d'opportunité.
Au contraire, les terribles pertes qu'il a subies et l'échec moral qu'il encaisse nous permettent de penser que la suite de la campagne ne peut qu'être victorieuse pour nos armes. Démoralisé et affaibli, l'ennemi nous laisse, outre le champ de bataille, l'occasion de le frapper à nouveau avec des troupes intactes au courage décuplé.
En ce qui concerne les pertes, les nôtres furent très modestes, de l'ordre de 200 hommes, alors que le décompte de celles de l'ennemi atteint à première vue plusieurs milliers, sans compter la douzaine de pièces d'artillerie démontées par nos boulets !
La cavalerie autrichienne, en particulier les valeureux hussards hongrois, a payé le plus lourd tribut en début de journée. Puis ce fut le tour de l'infanterie hongroise d'élite qui a été étrillée lors de ses assauts par l'artillerie et le feu bien ajusté de l'infanterie danoise. Sur tout le front, le feu soutenu de notre artillerie a creusé des sillons sanglants dans les rangs ennemis.
Les seuls combats sérieux au corps-à-corps se déroulèrent au sud, où je me dois de signaler le comportement de notre division espagnole. À l'extrême sud, défendant derrière un ruisseau affluent du Meckar, les troupes espagnoles ont été assaillies par l'élite de l'armée prussienne : ce furent d'abord des grenadiers qui franchirent avec réussite l'obstacle naturel bien défendu qui paraissait infranchissable. Les fantassins espagnols de première ligne, malgré l'appui de leur cavalerie légère, furent forcés de reculer. Couverts sur leur flanc gauche par leurs hussards d'élite, et sur leur flanc droit par leurs mousquetaires réguliers, les grenadiers prussiens s’avançaient.
C'était toutefois compter sans l'intelligence du général Masson qui commandait les braves Espagnols : malgré leur crainte d'affronter ainsi les plus terribles combattants de l'armée prussienne, les soldats espagnols furent si bien menés, grâce à la vaillance que leur chef imprimait et surtout grâce à la brillante articulation des différentes armes à sa disposition, que leur contre-attaque bouscula tout sur son passage. Les si terribles grenadiers, tout comme les hussards d’élite à tête de mort, tout, dis-je, fut repoussé pêle-mêle dans le ruisseau d'où ils étaient venus ! Dès lors, c'en était fini des tentatives de franchissement par des Prussiens démoralisés alors qu'au début de la journée ils considéraient avec morgue leurs adversaires espagnols.
Je veux dire mon admiration pour le général français qui les commandait ainsi que pour les régiments à pied et à cheval qui repoussèrent les meilleurs soldats ennemis. Je réclamerai plus tard, lorsque j'aurai les détails, des récompenses pour tous ces braves, notamment les officiers qui les menaient.
Le contingent de la Garde Impériale qui m'avait été confié n'a pas été engagé.
Le Maréchal Duc d’Heilsberg.