Merci Olivier,
Mais à peine ai-je communiqué ("une fois", ajoutent les Belges) la fiche de CN Espagne 1815 qu'un bouclier s'est levé, annonciateur de l'habituel tollé à venir dès que je modifie quelque chose (c.f. en 2009 pour Essling), s'appuyant sur mes soi-disant sympathies pour un camp et soi-disant antipathies pour l'autre.
Ce combat que je mène désormais depuis plus de trente-cinq ans a de quoi fatiguer un chêne. Mais bon, je vais le redire une fois de plus. Lorsque je modifie quelque chose c'est pour améliorer le rendu historique sur nos tables de jeu, point. J'ajoute qu'en l'occurrence de l'Espagne, dont certes je suis originaire (mais seulement à 25% préciseraient les Catalans d'aujourd'hui) il est à relever que sur mes vingt armées c'est la toute dernière à rejoindre l'ost Mané, la première à tous points de vue ayant toujours été la française.
L'actuel regain d'intérêt pour cette grande méconnue des guerres de l'Empire qu'est restée l'armée espagnole, est alimenté par la trilogie de remakes en cours (Tudela 2016, Ocaña 2017, Sagunto 2018) et, dans le cas particulier de 1815, les récents travaux que j'ai menés en parallèle de l'uchronie 1815 de Nicolas-Denis Remÿ puisqu'il m'a demandé d'y commander "los reales ejercitos españoles".
Puisque nous sommes justement dans le post dédié aux CN espagnoles et que celle en discussion à vocation à caractériser les armées de 1815 je vous ai mel ladite fiche afin de nourrir le débat puisque je vous ai demandé ce que vous pensiez de la démarche générale.
http://www.planete-napoleon.com/docs/L3 ... E_1815.pdfJe l'avais d'abord intitulée 1813-1815 car elle y répond... mais bien sûr pas complètement puisque basée sur l'Armée de Catalogne de 1815 (il manque par exemple les Guardias, alors absentes sur les Pyrénées). J'ai donc rétro-pédalé dans cette direction plus réduite et verrai plus tard à l'élargir.
Je vais maintenant m'appuyer sur des questions et commentaires de Nicolas afin de faire profiter la communauté de mes réponses. Il va de soi que je ne discute pas de ses choix personnels pour son uchronie du même métal, mais des miens pour la fiche de CN L3C ESPAGNE 1815 qui a vocation à figurer de manière officielle dans la règle.
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NR : - Pour l'infanterie, qu'appelles tu les Granaderos (grenadiers) mais de quoi puisque tu parles plus loin des compagnies d'élites.
DM : Les Granaderos de la première ligne du tableau sont le "5° de Granaderos", qui réunit les survivants des "divisions" de Grenadiers provinciaux supprimées en 1810 et transférées dans la Linea sous ce nom. Il s'agit donc là d'une sorte de "Grenadiers Réunis" permanents et "sanctuarisés", existant à la base depuis 1808 (et même avant). En l'occurrence d'authentiques vétérans d'élite. De mémoire il existe au moins une autre unité, dénommée "Granaderos de Castilla", mais son fonds est bien moins bon et, de toutes façons, elle n'est pas présente sur les Pyrénées en 1815, ni mentionnée comme opérationnelle ailleurs.
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NR : J'ai conservé la garde...
DM : Les Guardias n'étaient pas présentes sur les Pyrénées, probablement restées à la garde du roi.
Maintenant, dans le cadre de son uchronie Nicolas fait bien entendu ce qu'il veut, et s'il veut que les Guardias rejoignent le front ce n'est pas le général qui en disposera qui s'en plaindra.
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NR : ...mais j'ai tenu compte de tes remarques sauf pour les manoeuvres. Les témoignages montrent des troupes manoeuvrant à l'ancienne et peu souples, ...
DM : De quels "témoignages" disposes-tu sur les manoeuvres des armées espagnoles en 1815, que l'on peut à priori et vu d'ici considérer comme fort réduites puisqu'elles n'ont jamais eu à "manoeuvrer".
Du coup, distinguer si c'est "à l'ancienne" (la prussienne, à priori abandonnée) ou "à la nouvelle" (la française, à priori adoptée en pratique en 1810), paraît au moins discutable selon qui témoigne...
Nous entrons là dans une boîte de Pandore que j'ai toujours eu scrupule à ouvrir, mais justement parlons-en.
Doit-on s'appuyer sur les règlements écrits et connus, quitte à "taxer" (par le truchement de nos CCF) les troupes en fonction de leur éventuelle inexpérience relative ? Où doit-on leur attribuer un CCF général en fonction de leur plus ou moins grande habileté sur le terrain quel que soit leur règlement (ce qui serait bien plus simple) ?
Dans le droit fil de sa première version (1982) L3C s'appuie sur les règlements comme étant la seule "source durable et générale" que l'on peut comparer d'une nation à l'autre, et donc, pour l'armée espagnole le travail que je viens de réaliser confirme qu'au moins officiellement les règlements français étaient en vigueur en 1815.
Par ailleurs, prenant en compte le fait que l'absolue totalité de la troupe était composée de vétérans ayant pour la plupart plusieurs années de guerre (pas trop souffert après 1812), j'ai passé tout le monde à CCF 2, ce qui peut paraître redondant avec en parallèle l'amélioration du règlement, mais cela me semble pourtant fondé.
La seule et unique raison qui s'inscrirait en contre serait le manque d'officiers (comme en 1808-1810), or il y en avait bien plus que pléthore en 1815, et/ou leur incompétence relative, et là aussi j'ai considéré qu'ils s'étaient tout de même bonifiés d'expérience, sans oublier derechef qu'il y avait désormais moyen de trier parmi la masse disponible pour choisir les meilleurs.
J'ai pourtant trouvé un son de cloche discordant parmi les écrits de Palafox qui dit que ses troupes manquent d'instruction. Alors certes, ce ne sont pas celles de Castaños qui avait su s'entourer d'une "famille militaire" compétente (notamment le Brigadier Cabanes, traducteur et auteur de nombreux écrits sur la tactique) ni celles de Areizaga dont O'Donnel prit le commandement au moment de marcher, mais qu'il emmena en "promenade militaire" au Pays Basque, ce qui ne nous laisse aucun "témoignage" de combat.
Vous aurez cependant noté que j'ouvre la porte aux exceptions fondées*, mais en leur absence il convient de faire avec l'Espagne comme avec toutes les autres nations, sous peine de perdre la cohérence de l'ensemble.
* Positive dès avril 1809 pour la division Giron, qui appliqua les règlements français de 1791 alors que l'officiel espagnol en vigueur était une copie du prussien de Frédéric II.
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NR : elles conserveront en dehors de l'artillerie le statut espagnol.
DM : Pourquoi "en dehors de l'artillerie" ? Cette arme doit appliquer le même règlement que les autres, et j'avoue que cela m'embarrasse et que j'ai fait l'impasse relative du point de vue du BUDget. Précises ta pensée.
Ensuite qu'appelles-tu "le statut espagnol". Dans L3C l'Espagne est une nation et n'a pas de statut.
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NR : -Pour la cavalerie, même s'ils ont dans des brigades légères les dragons auront les mêmes chevaux que les linea. Quelle est ta source qui te fait changer ? Les données que j'ai pu glaner montre que le titre n'est que théorique, comme chez les Prussiens ou d'une certaine manière les Russes.
DM : Autre boîte de Pandore autour de laquelle je tourne depuis des années, mais parlons-en aussi.
Doit-on classer les troupes dans les catégories Lourde, Medium ("anglicisme") et Légère en fonction de :
1. La taille et/ou la "masse" des chevaux (ce qui est le plus souvent le cas car généralement documenté).
2. L'équipement des cavaliers et/ou leur doctrine et utilisation pratique sur le champ de bataille.
3. Leur classification ou appellation nationale, parfois en contradiction avec les critères précédents.
Alors L3C dans ses principes fondateurs penchait davantage pour les réalités que pour les apparences, mais, dans le souci de moins se différencier des autres systèmes lors des tentatives de rapprochement des années 90, les idées reçues de la "majorité" ont quelque peu perverti mes choix de l'époque qui sont encore en vigueur aujourd'hui, et sont apparus des classements influencés par le point 3 ci-dessus.
Je suis donc "entre deux" et ne peux en tenir compte dans une nouvelle fiche de CN sans le faire en même temps pour toutes. Exemple parfaitement illustré par le commentaire de Nicolas et le choix différent que la pratique en cours m'a, au moins jusqu'à modification générale, fait prendre.
Dans la cavalerie espagnole il n'existe en effet aucune différence entre les chevaux des diverses composantes de l'arme, et donc un Linea ou Dragon ou Husar sont montés sur des chevaux de même constitution, que l'on peut classer effectivement Type 2 dans L3C.
Comme il n'existe pas de troupes cuirassées (à l'exception de l'anecdotique "Coraceros Españoles" qui n'a plus de chevaux à l'époque qui nous intéresse) la différence entre Linea et Dragon est dans certains cas infime*, et celle avec les Husares ne s'exprime que doctrinalement pour les seuls vieux régiments, ce qui est le cas en 1815.
* Mais parfois c'est le contraire, énorme. L'uniforme des Dragons espagnols de 1802 n'est ni plus ni moins que celui d'un chasseur à cheval, et certains régiments entreront en guerre ainsi en 1808. Exemple les célèbres Dragones de Pavia, souvent représentés en jaune avec bicorne et latte de cavalerie lourde, que j'ai constatés encore en vert chasseurs et shakos à mirliton, en outre équipés de la lance, à Ocaña 1809 ! Autre exemple, le Linea de Alcantara qui looke en parfait chasseur à cheval, mais en bleu (comme vous le verrez bientôt parader parmi mes troupes).
Donc sur ces critères ce ne serait pas l'apparence qui compterait, mais l'usage qui est fait des troupes, lourde ou légère, puisque comme la française l'espagnole ignore le terme "moyenne". Et en 1815 dans l'Armée de Catalogne, très clairement et sans la moindre ambiguïté, les dragons, non seulement sont classifiés "cavalerie légère" par le nouveau règlement, mais constituent sans partage la "brigade de cavalerie légère", bien utilisée comme telle en avant-garde. Les deux "brigades de cavalerie lourde" sont constituées par les quatre régiments de Linea.
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NR : Pareil pour le CCF , elle conservera la manoeuvre espagnole, même si les troupes montent de niveau.
DM : Là, si je devais reculer* je dirai plutôt qu'elle adoptera la manoeuvre française, puisque c'est un fait officiel depuis 1810, quitte à lui conserver son mauvais CCF antérieur, ce qui serait dans l'ensemble bien plus juste car c'est essentiellement son inexpérience comme celle de ses officiers, sans oublier sa mauvaise composition, qui sont responsables de ses échecs répétés contre bien meilleure qu'elle.
* J'admets y avoir pensé pour la cavalerie (mais pas pour l'infanterie) qui est tout ce qu'il y a de plus maltraitée dans les sources britanniques (ce qui n'étonnera personne). Mais n'est-elle pas déjà bien handicapée par son niveau moral, son absence de bonus, ses pénalités de mouvement, etc... ? Je ne pense pas que le fait de manoeuvrer à la française dans ces conditions (ce qui la rend plus chère au BUDget) puisse la rendre l'égale des Français. Mais je vais tout de même creuser la question.
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Bon, à suivre, comme on disait dans les feuilletons de ma jeunesse.
Diégo Mané