par MANÉ Diégo sur 19 Nov 2015, 22:31
Etat d’esprit des soldats Français après la non-bataille du 3 juillet 1815
(juste pour que vous voyiez que l'armée était vraiment dans la disposition d'esprit adéquate pour livrer la oui-bataille de Paris que je vous propose samedi prochain !)
«L’arrêt subit du combat, le matin du 3 juillet, commença d’alarmer tous ces braves. Ils comprenaient qu’on allait les empêcher de se battre. «On est entrain de nous vendre», disaient-ils. La journée entière, puis la nuit et la matinée du lendemain se passèrent dans une attente irritante. Les hommes bivouaquaient en ligne derrière les faisceaux. Chaque heure qui s’écoulait augmentait l’inquiétude, le trouble, l’indiscipline. Vers midi, le 4 juillet, la nouvelle de la capitulation arriva aux troupes.
Elles devaient abandonner leurs positions, fuir devant l’ennemi, et, sans un coup de fusil ni un coup de sabre, lui livrer Paris et trente lieues de pays jusqu’à la Loire. La colère saisit l’armée. Les rangs sont rompus. Au milieu des murmures et des clameurs, on entend : «nous sommes toujours trahis ! C’est comme dimanche soir. - Combien le maréchal Davout a-t-il reçu pour livrer Paris ?- On nous vend comme des bêtes à cornes !- Restons ici. Nous nous battrons pour notre compte.- Que les Prussiens viennent nous faire partir !- Si l’empereur était là !- Vive l’empereur !- Paris est rempli de royalistes et de brigands.- Faisons-nous justice. - Brûlons cette ville de traîtres !- Ne nous en allons que quand tout sera brûlé.»
J’en passe mais pas des meilleures (quoique).
Au nord des artilleurs en révolte canonnent toute la journée les positions anglaises.
Les officiers de troupe et nombre de généraux sont aussi indignés, aussi furieux que les soldats. on veut retirer à Davout le commandement dont on le juge désormais indigne. Exelmans, Fressinet et plusieurs de leurs camarades abordent Vandamme et l’adjurent de se mettre à la tête de l’armée pour marcher contre l’ennemi. Mais Vandamme est converti depuis deux jours aux idées de Davout (avec pour dénominateur commun une rencontre avec Fouché !). Ainsi éconduits les généraux se cherchent un nouveau chef.
Dénoncés comme prêts à se mettre à la tête des troupes, Daumesnil et Hulin sont mis sous surveillance. On en appelle à Carnot (pour calmer les troupes), le seul membre de la commission à ne pas être suspect pour les soldats, qui voient toujours en lui «le grand Carnot». L’intervention de Drouot, le fidèle de l’Empereur, porte plus encore. Les grognards grognent une dernière fois, puis rentrent dans l’obéissance. L’exemple de la Garde entraîne la ligne à sa suite.
C’est fini ? Non, pas encore. La troupe refuse de s’en aller avant d’avoir touché ses arriérés de solde, or il n’y a plus d’argent. La commission est au désespoir. On pense enfin à s’adresser au banquier Laffite, qui consent à avancer les fonds en échange de garanties adéquates. Il est cocasse de mentionner que ces fonds si généreusement avancés par l’homme d’argent sont justement plusieurs millions or que Napoléon lui a confiés en dépôt huit jours plus tôt. Ce n’était certes pas la première fois que le trésor privé de l’Empereur servait à la solde de l’armée, mais ce fut la dernière !
Le lendemain, 5 juillet, et le surlendemain, l’armée tout entière évacua paris, farouche et furieuse, «en rugissant». Les soldats disaient que ce n’était pas fini, qu’ils reviendraient avec Napoléon, d’où la crainte sérieuse entretenue par Fouché et sa clique jusqu’à savoir Napoléon aux mains d’Albion, qui du coup parût un peu moins perfide, comparée à eux.
L’armée partie avec Davout, laissait Fouché maître de Paris, et libre de traiter avec Louis XVIII. Le roi sur le trône, lui au ministère. C’est que l’homme avait si bien manoeuvré qu’il était, pour l’instant du moins, «incontournable». La bourgeoisie parisienne le regardait comme son sauveur, car c’est à lui qu’elle devait «cette capitulation inespérée», qualificatif qu’aurait pu lui donner Blücher avec infiniment plus d’à-propos !
Heureusement que nous allons changer cette histoire-là samedi car elle n'est pas jolie-jolie !
Diégo Mané
"Veritas Vincit"