Dans le cadre de mes travaux sur 1809, menés l'an passé à l'occasion du bicentenaire, j'ai été amené, pour être complet, à traiter l'Armée russe de Galicie.
Ladite armée n'a guère motivé les historiens car elle n'a pas été "engagée" dans les combats, et pour cause. Le tsar Alexandre avait promis à Napoléon, lors de l'entrevue d'Erfurt, la mise en campagne de soixante mille hommes contre l'Autriche, si cette puissance venait à se déclarer contre la France.
Mais de fait, l'armée russe, qui comme toujours, preuve de son intérêt relatif, tenait d'importantes forces à la frontière du Grand Duché, et assista l'arme au pied à l'envahissement du territoire polonais par les Autrichiens, au combat désespéré de Raszyn et à l'occupation de Varsovie, ne reçut l'ordre effectif de pénétrer en Galicie qu'à la nouvelle des premiers succès de Poniatowski dans cette province.
Pris de court par l'inattendu de la résurrection polonaise, le Prince Galitzin, son chef, ne put y conduire qu'un peu plus de 40.000 sabres et bayonnettes. Ses instructions secrètes lui prescrivaient d'éviter soigneusement tout mouvement qui puisse aider ses "alliés" polonais comme toute rencontre avec l'"ennemi" autrichien. Il devait cependant occuper le maximum de terrain afin d'en laisser le moins possible aux mains des Polonais, ce qui aura son importance lors de la paix qui s'ensuivra.
Mais le Prince Poniatowski n'était pas dupe. Début Mai sa cavalerie avait intercepté une lettre de Gortchakov, destinée à l'Archiduc Ferdinand, commandant les Autrichiens du théâtre d'opérations. Le prince russe y félicitait chaudement le général autrichien pour sa prise de Varsovie, et y manifestait l'espoir de voir bientôt Russes et Autrichiens combattre ensemble les Français et les Polonais. La lettre fut bien sûr communiquée à l'Empereur, mais tout le monde fit comme si de rien n'était.
La liste des multiples avanies causées par ces embarrassants "alliés" est trop longue pour être énumérée ici. Citons tout de même la chute de Sandomir, assiégée par les Autrichiens, en présence "inactive" de deux divisions russes, et l'occupation d'une grande partie de la Galicie orientale par les troupes de Galitzin, ainsi que leur entrée à Lwow dont elles avaient d'abord attendu placidement que les Autrichiens chassent les Polonais qui s'y trouvaient, etc...
Le masque faillit bien tomber à Cracovie le 18 Juillet 1809. L'avant-garde polonaise avait reçu la reddition du gouverneur autrichien et Poniatowski devait entrer en ville le lendemain. Mais il apprit en pleine nuit que les Autrichiens introduisaient subrepticement dans la place des troupes russes, qui visaient à y devancer les Polonais, comme à Lwow.
Le prince se précipite, presque seul, vers la ville, et se jette littéralement sur les hussards russes qui tentent de lui barrer le passage. Plusieurs sont renversés et les autres s'écartent, laissant passer les premières troupes polonaises qui accourent à la suite de leur chef. Les généraux russes Sievers et Suvarov viennent protester, mais la vue de l'acte de reddition daté de la veille les fait taire. La ville sera toutefois occupée conjointement par les "alliés", mais bien acquises aux armes polonaises.
Les pertes de la campagne se réduisirent donc pour l'armée de Galitzin à quelques hussards contusionnés suite à la charge du prince polonais à travers leurs rangs et à un nombre indéterminé de victimes des nombreux duels qui eurent lieu durant l'occupation conjointe de Cracovie entre officiers des deux nations jusqu'à ce que les efforts de Poniatowski ramènent l'harmonie entre alliés.
Nonobstant, les événements auraient pu tourner autrement, dans un sens comme dans l'autre, et du coup il est intéressant de connaître l'ordre de bataille de ces troupes russes afin de "quantifier" le rôle qu'elles auraient pu tenir si d'aventure elles avaient pu/du/voulu s'engager effectivement.
Vous le trouverez ici :
http://www.planete-napoleon.com/docs/18 ... eRusse.pdf
Si infanterie et cavalerie sont clairement identifiées, ce n'est pas le cas de l'artillerie que j'ai évaluée au mieux.
La campagne de 1806 voyait une "division toutes-armes" dotée de deux batteries de Position, deux batteries Légères et une batterie à cheval... "Mais c'était avant le drame bien entendu", soit avant les pertes énormes en matériel de la campagne d'hiver, sans parler de celles subies ensuite.
La campagne de 1812 verra les divisions d'infanterie (qui ne seront plus "toutes armes") dotées de une batterie de Position et deux batteries légères, les batteries à cheval allant avec la cavalerie.
Nous sommes là à mi-chemin. Les réformes ont commencé timidement (les vraies seront en 1810), mais la nécessité doit faire loi. Les régiments n'alignent que deux bataillons sur trois et l'artillerie est certainement en rapport (l'artillerie Légère est sans doute toujours "régimentaire"). Quant'aux "corps" de cavalerie il faut bien leur envisager de l'artillerie pas prévue dans une organisation qui n'envisage que des "divisions toutes-armes". Lesdites batteries à Cheval en sont donc bien tirées !*
* Qu'il n'y ait que deux batteries procédant de quatre divisions ne doit pas choquer outre mesure. Rappelons que, par suite des pertes de la campagne d'hiver de 1806-1807, les batteries à cheval russes n'alignaient plus que huit pièces chacune lors de la campagne d'été. D'autre part il ne semble pas qu'initialement la 24e division, plus récente, ait été dotée d'artillerie comme les autres.
L'évaluation globale relative relève donc de mon intime conviction, mais je suis preneur de tout élément probant qui me permette d'améliorer sous ce rapport l'Ordre de Bataille proposé.
Diégo Mané