Sabres britanniques

Tous les sujets relatifs aux guerres de la Révolution et de l'Empire (1792-1815) ont leur place ici. Le but est qu'il en soit débattu de manière sérieuse, voire studieuse. Les questions amenant des développements importants ou nouveaux pourront voir ces derniers se transformer en articles "permanents" sur le site.

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Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 27 Sep 2009, 15:28

Recherches relatives aux modifications de CN L3C envisagées (Juillet 2009).

Trouvé dans “British Cavalryman” de Haythornthwaite

p 26 : manières d’utiliser un sabre,

THRUST = estoquer = “pointer”.

CUT/SLASH = couper/tailler = “sabrer”.

Après avoir développé les blessures horribles infligées par les sabres britanniques ...
(quand ils touchaient l’adversaire) : “nevertheless, he admitted the dreadfull power of the French thrusting sword...” soit “la terrible puissance de l’épée d’estoc française”.

Mle 1788 (britannique). “The imperfections in these patterns became obvious in the Netherlands 1794-95, especially when compared with the sabres of the... Austrians...”.

“...the hilts of the heavy sabres so unbalanced the blade that many men and their mount were injured by their own weapon when attempting to slash at the ennemy.”

Bref, ce modèle était si mauvais que biens des cavaliers se blessaient eux-mêmes ou blessaient leurs propres chevaux lorsqu’ils tentaient de sabrer l’ennemi.

Mle 1796 (britannique). “...copied from the Austrian for heavy cavalry... double edged for only 12 inches... it could not be used for thrusting... ill-contrived machine. Is too heavy, too short, too broad, ...”.

Image

D’où il ressort que ce modèle, “mal conçu, à double tranchant sur seulement 30 cm, ne pouvant pas être utilisé d’estoc, trop lourd, trop court, trop large... était copié du modèle autrichien de 1775... qui donc présenterait les mêmes défauts ?

Lu aussi quelque part que la garde présentait le double inconvénient de protéger insuffisamment le poignet tout en étant très gênante pour le transport.

Mle Light cavalry. “... curved. It could only really be used for the slash... We can answer for its utility in making billets for the fire.”

Plus courbe (trop semble-t-il) que le modèle 1788, plus large, long de 83 cm, ce sabre ne pouvait servir que de taille... son utilité selon un officier britannique de l’époque ?
Couper du bois pour le feu !

Conclusion générale : en plus d’être mauvais par construction, ces sabres ne permettaient pas de pointer avec et se trouvaient notablement inférieurs aux français.


Trouvé dans les “Mémoires de Chlapowski” :

P. 99. A propos du combat de Benavente, où les Chasseurs à Cheval de la Garde
ont subi un échec et vu leur général, Lefebvre-Desnoëttes, capturé :

“Plusieurs chasseurs nous montrèrent des contusions sur leurs dos et sur leurs bras, et des marques noires sur leurs visages ; ils nous dirent que les Anglais les frappaient du plat du sabre au lieu du tranchant, leurs sabres trop larges de lame ne permettant pas d’assurer leurs coups comme avec les nôtres.”


Trouvé dans les “Souvenirs du lieutenant Chevalier” :

* “... nous vîmes accourir... un régiment de cavalerie anglais... pour nous charger, ils ne pouvaient connaître notre nombre parce-que nous étions en colonne serrée par escadron : “laissez-les venir, dirent nos généraux, mais pas de coups de sabre, des coups de pointe, de bons coups de pointe.” Ils arrivent sur nous avec leurs habits rouges, perchés sur leurs chevaux, ivres d’eau-de-vie et la latte à la main, faisant voler à droite et à gauche leur mauvais sabre... Nous nous ouvrons un peu... ils entrent... et, en moins de dix minutes, il ne restait pas un seul habit rouge à cheval, ce beau régiment, qui, je crois, était de la Garde Royale fut entièrement effacé...”.

Trouvé dans “Ceux qui bravaient l’Aigle”, de Patrice Courcelle :

Latte (britannique) modèle 1796 : La version originale de cette arme constitue d’après les soldats qui s’en servent “la plus mauvaise arme jamais infligée à l’armée britannique”, utilisable ni pour les coups de taille ni pour les coups de pointe.

Des modifications y sont apportées peu avant Waterloo mais sont loin d’être générales, même au sein d’un même régiment (Scot Greys). Les “Blues” ne l’ont pas faite du tout.
La modification tend à rendre l’arme capable de pointer. C’est un plus, même pour des soldats sans expérience de la chose, mais n’améliore pas la capacité de tailler.

Corps de Lützow : on apprend que ce corps franc prussien était équipé du sabre de cavalerie légère britannique modèle 1796, ou du

“Sabre de cavalerie légère modèle 1808 prussien : rigoureusement identique au sabre britannique décrit ci-dessus.”

D’où, techniquement, la cavalerie légère prussienne utilisait un sabre aussi “performant” que le britannique !

CQFD.

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Re: Sabres britanniques

Messagepar HYVRON Jean-Pierre sur 27 Sep 2009, 17:38

J'avais déjà lu un truc dans ce genre. Le poids de l'arme contre-balançait ces défauts, mais il est certain que si le coup tombe à plat, c'est le cas de le dire, il devait faire plus de contusion que de mal, comme à Bénavente. Il est étrange que les ateliers régimentaires n' aient pas affuté les sabres. Si je me rappelle bien, c'est De Brack qui rappelait que les cavaliers devaient toujours avoir une lime pour ce travail indispensable.
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Re: Sabres britanniques

Messagepar REMY Nicolas-Denis sur 06 Nov 2009, 12:38

Pour les livraisons de sabres britanniques aux Prussiens :

3500 livrés entre fin 1812 et septembre 1813. chiffre des comptes prussiens.
Ils furent livrés principalement aux Landwehr et à ceux qui en avaient accès dans le nord de l'Allemagne.

Je reviendrais sur les sabres prussiens plus tard, mais le modèle 1808 a été vite remplacé par les modèles français récupérées dans les dépôts français en grande quantité.

Pour la cavalerie de ligne ( lanciers à cuirassiers), c'est le sabre ou l'épée modèle 1733 qui est utilisée. Puis ce sont les stocks français ( exemple le Dragon "Königin" était équipé en 1815 de sabre français de cavalerie légère. Ce qui est normal au vue de la politique du moment, le dragon est un cavalier léger, même si dans les faits ce n'est pas le cas !)
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Re: Sabres britanniques

Messagepar REMY Nicolas-Denis sur 07 Nov 2009, 11:53

D'après Jany ( Tome IµV de Preussische Armee, p43), la cavalerie prussienne est enfin réequipée totalement avec des sabres d'inspiration britannique en 1811.

Cependant Ortenburg ( Waffe und Waffengebrauch im Zeit Alter der Revolutionskriege, p107) que les cuirassiers prussiens étaient encore équipée de la dague "Pallasche" du modèle 1733, celle qui leur avait donnée la suprématie sur les autres cavalerie lors de la guerre de 7 ans, lors de leur arrivée à Paris en 1814. Trouvant les stocks français de cuirasses et de l'épée de cavalerie lourde, qui était plus longue, ils les prirent .

Pour l'équipement des autres unités, c'est plus compliqué. Les Dragons ont théoriquement la même arme ( le Pallasche) mais leur statut nouveau de cavalerie "légère" leur fait donner plus ou moins le sabre. En 1814, après la chute de Paris, ils ont tous le sabre de cavalerie légère modèle français ( Ortenburg toujours), mais les reproductions de 1815 montrent des épées pour certaines unités !
Pour les uhlans, c'est l'épée, mais les uhlans prussiens sont en 1815 un rassemblement d'unités disparates. En théorie, Jany et Ortenburg sont d'accord sur l'arme ( l'épée) mais en pratique c'est plus dur de savoir !

Pour les corps francs, les équipements sont certes théoriquement anglais, mais la prise de stocks westphaliens dès septembre 1813 pose problème. En 1815, ce n'en est plus un, c'est le sabre ou l'épée française qui est de mise.
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Re: Sabres britanniques

Messagepar MASSON Bruno sur 10 Nov 2009, 19:29

Diégo m'a déjà plusieurs fois raconté cette anecdote du lieutenant Chevalier, et je crois me souvenir de lui avoir fait une fois la réflexion "c'est beau comme du Victor Hugo", mais je n'avais jamais vraiment trouvé de vraie preuves pour aller contre ce témoignage.

or hier j'ai trouvé le fac-simile de la London Gazette du 3 juillet 1815 avec la liste nominative des officiers morts et blessés de l'armée Anglo-Hanovrienne, qui corrobore ce que je savais déjà, aucun régiment (encore moins "de la garde anglaise") n'a jamais été annihilé à Waterloo...

si on reprends les régiments correspondants à la description "en habits rouge " et "de la garde Anglaise", on trouve les 2 Life Guards, présents à 2 escadrons chacuns, et on peut rattacher le 1st Dragoon Guard qui est "regiment of Horse '' au même titre que les deux autres.

les ratios de pertes sont

1st Life Guard: 16 officiers au départ, 4 morts(dont le Major-Lieutenant-Colonel la tête ouverte d'un coup de tranchant et achevé d'un coup de lance), 3 blessés 43% de pertes
2nd Life Guard: 18 officiers au départ, 3 morts (dont 1 sûr par balle), 1 blessé (lors d'une charge contre des cuirs) 22% de pertes
1st Dragoon Guard: 30 officiers au départ, 6 morts, 4 blessés 33% de pertes
(Horse Guards: 24 officiers (sans compter Vilainton) au départ: 1 mort, 7 blessés 33% de pertes)

pour les autres régiments "rouges"
1st Dragoon: 25 officiers au départ, 5 morts, 8 blessés 52% de pertes
2nd Dragoon: 29 officiers au départ, 8 morts, 8 blessés 55% de pertes
6th Dragoon: 23 officiers au départ, 1 mort, 5 blessés 26% de pertes

Quand aux "mauvais sabres anglais", c'est sûr, ils n'étaient semble-t-il pas fameux, mais cela n'a pas empêché la cavalerie Anglaise de ne jamais être battue par son homologue en Péninsule..

Ps: Benavente, c'est 5-600 chasseurs de la garde Française contre les piquets de la brigade de Hussards (100 sabres)+ 1,5 escadron de Hussards KGL (100 sabres)qui les tiennent en respect jusqu'à Benavente, puis le 10e Hussard (450 sabres) qui repousse jusqu'au pont. le 18e est resté en soutient, le 7e et le reste du 3e KGL ne sont pas intervenus. Tout ça avec un mauvais sabre, des chevaux ferrés juste aux antérieurs par manque de fers et de clous, un Busby qui tombe en pièce dès le premier coup de sabre, et le général Slade pour commander le début des évolutions...

je me méfie des armes qui "ne font que des bleus", mais dont les porteurs gagnent les combats...

sources, le" Waterloo roll call", Oman, "Galoping at everything" de Ian Fletcher, et la page:
http://www.london-gazette.co.uk/issues/17033/pages/1308
MASSON Bruno
 

Re: Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 14 Mar 2010, 23:18

Suite à la conclusion de Bruno je précise qu’il n’est ici exposé que des faits. Parfois les Français gagnent, parfois ce sont les Britanniques, peu importe. Ce qui compte en l’occurrence c’est déterminer l’efficacité de leurs sabres.

Il est évident que, selon le narrateur, le fait d’armes est plus ou moins enjolivé, et que, selon les circonstances, le résultat est à apprécier différemment.

Lorsque je cite un auteur je ne peux me permettre de couper ce qui me gêne dans son propos pour ne garder que ce qui m’intéresse. Dans l’anecdote narrée par Chevalier à Waterloo, il convient de relativiser le terme “régiment” (il peut fort bien ne s’agir que d’un escadron), et “de la Garde Royale, je crois...” (disons qu’il s’agissait de “Dragons”), ce qui ne change rien à ce que je voulais souligner, à savoir l’ouverture des rangs de l’unité recevant pour laisser pénétrer l’unité attaquant, et aussi la tactique des coups de pointe, carrément ordonnée par les officiers avant le choc.

J’ai plus récemment trouvé une circonstance approchante dans le texte donné sur la batterie Mercer à Waterloo (ouverture réciproque des rangs par unités se croisant).
Et là pas de coups de pointe car les unités se croisant au galop celui qui aurait pointé aurait certe “planté” son adversaire mais se serait démis le bras dans le processus.

Je suis entrain de lire d’intéressants mémoires dont je ferai peut-être un plus ample exposé mais, dans l’immédiat, j’en tire des éléments intéressants pour le sujet du post.

Je cite le Sous-Lieutenant Charles de Sallmard, 22e Dragons, combat de Majadahonda le 11 Août 1812, contre des Dragons lourds de la King German Légion :

“... la mêlée fut affreuse. Nous étions si serrés qu’à peine l’on pouvait faire usage de ses armes. Je combattis corps à corps avec un officier anglais, il coupa la monture de mon sabre, le mouchoir qui m’enveloppoit le poignet. J’eus le bonheur de lui donner un coup de pointe qui lui traversa le corps.”

Puis l’auteur développe, citant Parquin qu’effectivement j’ai retrouvé aussi :

“... Charles, qui comme ses compatriotes frappait toujours de pointe “tandis que les Anglais ne se servaient de leurs sabres que par le tranchant de la lame, qui a une largeur de trois pouces... si le tranchant arrivait (une fois sur vingt), le coup était terrible”, se rappelle le commandant Parquin : il vous tuait ou vous abattait le bras.

Effectivement, en dépit de l’ordonnance, les nôtres chargeaient le coude plié, quand ils auraient dù tenir le bras tendu ; aussi l’arme ennemie pouvait les amputer *, c’est pourquoi beaucoup portaient des épaulières de métal, en se f... du règlement.

... Ces armes de bûcherons (les sabres britanniques) faisaient des blessures plus graves que les nôtres, mais plus rares.”

* C’est ce qui arriva au colonel Sourd du 2e Lanciers à Genappe le 17 Juin 1815.
On finissait à peine de détacher le bras du corps à l’ambulance, qu’en présence de Napoléon qui veut le nommer général, ce brave officier, un pansement sommaire sur son moignon, remonte à cheval et rejoint son régiment en criant : “que le grand Napoléon me pardonne, mais le grade de colonel est tout pour moi !”.


Puisque j’ai sorti le Parquin pour vérifier la citation plus haut j’y ai trouvé la relation d’un combat singulier dans les deux sens du terme :

“Le 15 Juillet (1812)... le maréchal duc de Raguse faisait une reconnaissance près de la ligne ennemie, lorsqu’un officier (anglais), dépassant les vedettes de son armée, vint faire caracoler son cheval...

“Que veut cet officier” dit le duc de Raguse ?
Etant adjudant-major de son escorte, je répondis : “Monseigneur, cet officier veut sans doute échanger un coup de sabre et si je n’étais de service auprès de votre Excellence...
--- Qu’à cela ne tienne, reprit le maréchal ; je vous accorde la permission”.

Ces paroles étaient à peine prononcées que je mettais mon cheval au galop et rejoignais l’officier anglais. Je parais le coup de sabre qu’il me porta, puis je ripostais par un vigoureux coup de pointe qui le renversa de cheval. Passant lestement la lame de mon sabre dans les rênes de la bride, je ramenai l’animal en laisse aux applaudissements du maréchal et de ses aides de camp. ...”

Parquin renvoie aussitôt le porte-manteau de l’Anglais. On le remercie du procédé, l’informe que la blessure de sa victime, quoique dangereuse ne sera pas mortelle, et on lui propose de racheter le cheval en l’avertissant “qu’il n’était que de seconde race”. Ce a quoi notre chasseur répondit : “c’est possible, mais il me sera agréable de monter un cheval anglais et je le garde.”

Bon, la fin concerne moins l'usage du sabre que celui des bons procédés entre nations civilisées, mais le coup du cheval m'a plu et je vous en ai donc gratifiés.

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Re: Sabres britanniques

Messagepar DUPREZ Frédéric sur 19 Mar 2010, 17:50

Très intéressant sujet. J'ai récemment lu les mémoires du lieutenant Woodberry particulièrement ronflants aussi. A les lire, on se demande même pourquoi les Anglais sortaient le sabre.
Néanmoins si on se montre quelque peu honnête on peut avoir la même prudence face aux récits français... Difficile de sortir le faux du vrai sans juxtaposer plusieurs témoignages comme vous le faites ici pour déterminer des constantes fiables.

Pour pratiquer la course de tête dans le cadre de la reconstitution historique, l'ordonnance prescrit de pointer la dernière des têtes. Nous enfilons les sacs remplis de foin sur des poteaux pour les maintenir. J'ai pointé un jour le poteau à l'intérieur du sac, cela fait extrêmement mal (ma mauvaise copie de sabre a cependant résistée) En outre, si le sac reste tenu au poteau au moment où on souhaite l'enlever, la vitesse du cheval nous renvoie assez violemment le bras en arrière.
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Re: Sabres britanniques

Messagepar MASSON Bruno sur 23 Mar 2010, 06:38

j'ai recherché dans les sources Anglaises, et l'anecdote de Chevalier me semble hautement improbable (même contre un escadron)

la seule charge de cavalerie Anglaise hors des lignes est faite contre le 1er corps, la garde Impériale n'est pas impliquée
les autres "charges" Anglaises sont des contrecharges contre des cavaliers déjà désorganisés par le passage entre les carrés, jamais les chasseurs n'auraient pu se retrouver "en colonne serré par escadron".De plus, à ce moment, un "escadron" de dragons Anglais ne représente plus qu'environ 80 cavaliers, contre un gros régiment comme celui des chasseurs de la garde, il est normal qu'il se trouve "effacé"

Même si cela n'a jamais eu lieu pour moi (aucune preuve nulle part)....

le modèle 1788 de cavalerie légère est abandonné en 1802, remplacé par le modèle Le Marchand de 1796 (à cause des défaut cité par Diégo sur le modèle 1788) qui donnera pleine satisfaction (et qui aurait du équiper aussi la cavalerie lourde, mais sera refusé contre une copie modifiée du sabre Autrichien modèle 1775).
Il me semble erroné de juger ces armes en prenant en compte le fait qu'ils ne puissent pas pointer, car les coups de pointes sont interdits dans le manuel d'escrime (qui est parfaitement connu de tous les cavaliers Anglais) car 'facile à parer et rendant vulnérable à la contre-attaque'.
un compte rendu du côté Anglais qui contredit complètement ce point de vue Français, Georges Farmer du 11th Light Dragoon (à propos de l'action de Villagarcia le 11 avril 1812) "...the French Cavalry, in nine case out of ten, make use of the point, whereas we strike with the edge, which is, in my humble opinion, far more effective" et finit en disant que les deux côtés sont horribles à voir, même si les blessures Françaises sont bien plus impressionnantes.

à suivre, là je dois partir au boulot
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Re: Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 27 Fév 2011, 17:12

Suite à la lecture d'articles relatifs aux sabres de cavalerie prussiens trouvés dans des vieux numéros de “Tradition” j’apporte de nouveaux éléments à notre discussion.

Erreur d'aiguillage, penseront certains, en se demandant ce que viennent faire les sabres prussiens dans un post dédié aux sabres britanniques. Eh bien c'est simple, ce sont en fait les mêmes !

“Le sabre de cavalerie prussien modèle 1811”, par Martin Ehretsmann, Tradition n° 97 de Février 1995, pages 44 à 46, extraits pertinents :

“Après la cuisante défaite de 1806-1807, l’armée prussienne choisit de compléter les sabres manquants de ses hussards en important le modèle 1796 de cavalerie légère anglaise, lequel allait être ultérieurement adopté en Prusse de façon officielle sous la dénomination de “Kavalleriesäbel M 1811”.

Image

... D’après des recherches plus récentes (postérieures à 1963) , il semblerait que 6.000 de ces sabres anglais furent réceptionnés à Colberg dès le 17 mai 1807. ... / ... A ce premier envoi viendra s’en ajouter un second de 10.000 pièces en 1813.

... / ... la Kürassierpallasch 1817 (französische Form). Il s’agit, dans ce cas, du sabre de grosse cavalerie modèle An XI français, saisi, en avril 1814, au dépôt central de l’Artillerie à Paris et immédiatement distribué. A la fin du mois les cuirassiers prussiens en sont tous armés.” On constate là aussi que le décret officiel suit, en l’occurrence de trois ans, l’adoption de l’arme au lieu de la précéder.

L’auteur pense donc que la cavalerie prussienne, cuirassiers exceptés, soit donc hussards, dragons et uhlans, sera dotée, à partir de 1807, ou 1808-1809, mais en tous les cas effectivement avant 1811 où ce sera officialisé, du sabre de cavalerie légère britannique de 1796. On ne trouve aucune trace de sabre de ce modèle qui ait été fabriqué en Allemagne avant 1831. Il n’en seront pas moins baptisés “Blüchersäbel”.

Toutefois, “lors de la campagne contre la France (1814), le 1er régiment de uhlans et le 2e dragons... se sont spontanément équipés d’armes blanches prises sur l’ennemi et, en particulier pour la troupe, de sabres français de cavalerie légère modèle An XI. ... / ...

Il est impossible de savoir pour quelle raison exacte (existence de sabres anciens dans ces régiments ?) ces cavaliers s’armèrent d’armes de prise alors qu’officiellement, ils devaient être équipés du modèle de 1811 (donc le britannique de 1796) avant les combats contre l’armée napoléonienne...”. Il est dit plus loin que le 2e dragons gardera ses sabres français jusqu’en 1852 au moins (j’ai aussi lu 1858) !

J’ai ici fidèlement repris le texte de l’auteur et donc aussi la question qu’il se pose, mais pour moi la réponse ne fait aucun doute, l’échange des armes n’a eu, outre l’aubaine bien sûr, qu’une seule motivation, les françaises capturées étaient tout simplement bien meilleures.

En résumé :

En 1813-1815, toute la cavalerie prussienne, cuirassiers exceptés, est armée du sabre de cavalerie légère britannique de 1796.

Toutefois, en 1815, le 1er uhlans et le 2e dragons seront armés du sabre de cavalerie légère française modèle An IX / An XI.

Les cuirassiers, probablement armés du Kürassierpallash de 1733 en 1813 et 1814, seront en 1815 armés du sabre de grosse cavalerie française modèle An XI.


Je vous donnerai la suite, tout aussi instructive sinon plus, une prochaine fois.

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Re: Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 04 Mar 2011, 17:50

Suite... alors n'ayez pas peur du titre de l'article plus bas, je n'en ai tiré que le pertinent.

“Le sabre de cavalerie prussien modèle 1852”, par Martin Ehretsmann, Tradition n° 101 de Juin/Juillet 1995, pages 35 à 40, extraits pertinents pour le Premier Empire :

“Le coup de taille contre l’estoc ou le sabre prussien contre la forte-épée française.

... / ... Au cours des guerres napoléoniennes, notamment lors des combats entre prussiens et cavaliers français principalement au cours des années 1813-1815, il s’avéra fort logiquement, que face à ces adversaires armés d’une forte-épée, le combat penchait en faveur de la lame droite destinée à parer les coups et surtout à assurer un coup de pointe définitif.

Le sabre modèle 1811 prussien, copie du light cavalry trooper sword pattern of 1796 anglais n’était en fait adapté qu’à une réponse ponctuelle de pénurie d’armement.
En outre, la Prusse avait également opté pour le sabre en raison de ses choix traditionnels qui la portait à privilégier majoritairement le coup de taille dans son escrime alors que la cavalerie française avait choisi l’emploi de l’estoc.

D'où l'à-propos de l'illustration qui suit, sabre pas britannique du tout cette fois car "d'estoc" français Mle An XI de Grosse Cavalerie, soit ici de Dragons, dont seul le fourreau diffère de celui des Cuirassiers.

Image

Fréquemment lors d’un combat la situation des adversaires s’avérait être la suivante : au moment de l’attaque le cavalier français se penchait le plus en avant possible le long du cou de son cheval, attaquait le bras armé plongé vers l’avant. Le sabreur prussien essayant d’atteindre par un coup de taille son adversaire ne rencontrait en fait qu’un dos incliné dont la buffletterie pouvait assurer une certaine résistance. C’est alors que le plus souvent le cavalier français essayait de glisser la pointe de son arme dans l’aisselle du prussien tandis que ce dernier levait à nouveau son sabre. La parade à l’arme blanche était évidemment recherchée avant tout, mais il est certain que l’équipement pouvait éviter bien des risques dans le cas d’une attaque aussi audacieuse."

A suivre...

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Re: Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 07 Mar 2011, 10:42

Suite de l'article...

La protection de la main

En 1842, à l’occasion d’essais d’un nouveau sabre par une brigade de cavalerie prussienne, il est dit :

-Qu’avec le sabre de l’ancien modèle (le 1811) l’estoc était impossible.

-Que parer un coup de taille est très difficile.

-Qu’asséner un coup de taille efficace n’est pas non plus chose aisée.

... et pour le nouveau qu’”il serait souhaitable de couvrir la main avec une monture en panier, ce qui à n’en pas douter redonnerait au cavalier confiance en son arme.”

De là à dire qu’il l’avait perdue...


Rien ne bouge jusqu’en 1848 et la guerre du Holstein où la presse militaire rapporte une escarmouche de cavalerie contre les Danois. Les trois seuls prussiens blessés le furent à la main droite. Un soldat répond aux “journalistes” :

“Ah oui, un sabre à monture en panier serait une fort jolie chose !” Le sabre prussien actuel (modèle 1811) est un sabre de forme anglaise dont les faits démontrent que les Anglais - qui sont pourtant des gens pratiques - ont réussi à adopter une arme totalement inadaptée pour leurs cavaliers.” Manière à peine détournée de dire que, ce même sabre étant celui doté à la cavalerie prussienne, il s’y trouvait tout aussi inadapté.

La même presse faisait alors référence à plusieurs reprises au 2e dragons et à ses sabres français de cavalerie légère modèle An IX / An XI en lui reconnaissant de nombreux avantages, et notamment sa “Korbgefäss” (garde en panier).

Ci-dessous un sabre de cavalerie légère française modèle An IX.

Image

Donc pour résumer ce florilège de critiques, ces sabres britanniques mle 1796 sont,
du point de vue offensif, impossibles à utiliser d’estoc, et malaisés à utiliser de taille.

Et d’un point de vue défensif, offraient une protection insuffisante de la main, et s’avéraient d’un usage très difficile pour parer un coup de taille.

Et pour parer un coup de pointe ? Ils ne le disent pas !

Quoiqu’il en soit il ressort de tout cela que les Français disposaient d’un meilleur armement* et d’une meilleure escrime. De là à dire qu’ils étaient meilleurs...


*J’ai aussi lu que les Alliés ont pillé plusieurs dépôts de vêtements pour habiller leurs troupes, littéralement en haillons avant d’entrer dans Paris en 1814. Donc armements, équipements, et même chevaux, l’armée française était sans doute moins démunie que ses adversaires dans ces domaines, contrairement à l’idée communément entretenue. Non, ce qui lui manquait vraiment le plus, c’était des soldats faits.

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Re: Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 12 Mar 2011, 11:06

Il ressort d’un petit tour d’horizon effectué dans mes sources ce qui suit.

Les sabres français sont bien connus.

Les sabres britanniques aussi.

Et du coup les prussiens, qui sont les mêmes, pareil.

Les Autrichiens, qui ont inspiré les britanniques, sont à traiter comme tels, sauf pour leur modèle de cavalerie lourde qui a été “taillé en pointe” après 1798, et donc rendu capable de pointer. L’ont-ils fait pour autant, je l’ignore.

Les Russes ont dès le principe des lattes “en pointe”. Leurs sabres de cavalerie légère, bien que présentant une pointe “en biseau”, sont bien plus courbes que les français, et donc sur ces deux critères moins aptes à pointer et moins maniables.

Ci-dessous le modèle 1798 de cavalerie légère russe.

Image

Les modèles 1809 présentent des gardes en panier similaires aux françaises.

De tout ce que dessus, et tenant compte des constatations antérieures, je conclurais à une infériorité matérielle et/ou doctrinale par rapport aux Français, marquée pour les Britanniques, Prussiens et Hongrois, et plus légère pour les Russes et Autrichiens, ce qui explique peut-être relativement leur plus grande “réussite” contre les Français.

Diégo Mané

Le but c'est le chemin... que l'on s'ouvrait parfois à coups de sabre !
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Re: Sabres britanniques

Messagepar MASSON Bruno sur 16 Mar 2011, 07:57

je ne peux que m'inscrire en faux sur tout ce qui concerne les Anglais....

l'"infériorité matérielle" du matériel Anglais face au matériel Français n'est valable que dans le cadre d'une escrime...Française! (ou du moins "continentale")

la réciproque est vraie pour les sabres français dans le cadre de l'escrime Anglaise, sinon, vu le nombre de prisonniers Français fait tout au long de la Péninsule, les régiments Anglais (ou KGL) auraient vite fait d'adopter des sabres de capture, or aucun ne l'a fait, c'est bien la preuve que les deux systèmes étaient incompatibles....

il est donc illusoire de vouloir comparer les deux cas, car il n'y a pas de base commune.

quand à la supériorité doctrinale Française, elle est contredite par les faits. A chaque fois qu'il y a eu combat de cavalerie à effectif équivalent, les Anglais l'ont emporté sans problèmes. Même les Chasseurs de la garde à Benavente n'ont pu venir à bout de Hussards de ligne d'un effectif à peine supérieur (la Brigade Slade n'est pas intervenue, retardée par le caractère lunatique de son commandant)
MASSON Bruno
 

Re: Sabres britanniques

Messagepar MANÉ Diégo sur 22 Mar 2011, 16:19

"Galloping at everything" est, je crois, un bouquin anglais que possède Bruno et qui dépeint bien le comportement des cavaliers britanniques. Je n'ajouterai rien à ce titre si évocateur.

Alors certes, une fois de plus, les succès ont alterné, mais il faudrait les analyser un par un pour en tirer, peut-être, des conclusions utilisables ludiquement... comme je l'ai fait pour l'armement !

Pour Benavente, il ressort de ce que j'ai écrit dans mon Livret "Les Trois Couleurs" n° 15, "L'Aigle et le Léopard", qu'il n'y a pas eu réellement combat, puisque Lefebvre-Desnoëttes le rompt en pleine charge lorsqu'il s'aperçoit être menacé de flanc, se rappelant alors qu'il à l'ordre de ne pas compromettre ses chasseurs. C'est essentiellement dans la "chasse à courre" vers l'Esla qu'il perdra du monde, étant lui-même capturé dans le processus. De très nombreux chasseurs s'en sortiront avec de forts hématomes infligés par les sabres britanniques arrivant à plat au lieu du tranchant. CQFD.

Un autre exemple dont je m'étonne que Bruno ne l'aie pas "sorti" nous est donné par le combat de Sahagun, où les Hussards du 15th ont rossé le Ier de Chasseurs à Cheval provisoires et le 8e de Dragons.

Les effectifs sont les mêmes à 500 hommes de part et d'autres, car le 10th Hussars ne trouvera pas à s'employer, ses camarades du 15th ayant fini le travail avant son arrivée, au prix d'une trentaine de pertes contre dix tués et cent-cinquante-sept blessés et/ou prisonniers.

Il faut ajouter que les Anglais fournissent à l'aube une attaque surprise. Que les conscrits français ont à peine eu le temps de se déployer derrière une vigne et mis haut la carabine pensant stopper en tirant l'ennemi au milieu des ceps. Il n'en fut rien, et les chasseurs provisoires, à l'arrêt carabine vide, furent violemment percutés par les hussards, culbutés en vrac sur les dragons pas encore formés qu'ils masquaient et qui churent en masse, général y compris, sous la poussée.

Image

Bon, sur l'image nous ne voyons pas la "couche" de chasseurs-pêle-mêle rabattue sur les dragons, mais il faut bien admettre que dans ce cas le message visuel eut été encore plus "confus". Indeed !

Sur cet exemple, non exhaustif, j'insiste, nous voyons que ce ne sont pas les sabres britanniques qui l'emportent sur les sabres français, mais bien la conjonction de la surprise, d'une mauvaise situation, d'un mauvais choix du général Debelle, et surtout de la qualité des chevaux respectifs concernés, sans parler de celle des soldats. Un extrait d'L3C 15 pour river le clou, Doctor Adam Neale speaking :

"...j'ai visité aujourd'hui nos prisonniers ; comme tous ceux dont je vous ai parlé, ce sont de beaux jeunes gens pris parmi les différentes nations soumises à la France... leurs chevaux sont généralement chétifs, beaucoup plus petits et plus maigres que les nôtres, et, comme vous le croirez facilement, en très mauvais état ; près d'un tiers de ces chevaux sont blessés sous la selle. Telle est la supériorité de force et d'ardeur de nos chevaux qu'ils enfonçaient et renversaient ceux de l'ennemi, comme une boule abat un jeu de quilles. ..."
.../...
"D'un autre côté, un grand nombre de Français sont dans une situation déplorable par l'effet de la température. J'ai été obligé de faire couper les bottes de plusieurs soldats qui n'avaient pu les ôter depuis huit jours et dont les pieds étaient dans un état de putréfaction absolue.

"Monsieur le Médecin, nous mourrons ici comme des mouches", me disait dernièrement un de ces pauvres misérables, conscrit depuis six mois..."

Re-CQFD. Des conscrits malades, mal commandés, montés sur des chevaux chétifs et blessés sont "bousculés" par une charge à fond menée par des soldats faits montés sur des chevaux magnifiques.
Je crois qu'en l'occurrence 1 point d'écart à l'escrime (au demeurant difficile à faire avec une carabine, même vide) ne trouvera pas même à s'exprimer sur la photo, contrairement à cette magnifique illustration, censée représenter notre combat, et sur laquelle nous voyons les chasseurs "tailler" et les hussards "pointer". Mais bon, même de l'esprit, la vue est belle et je vous la livre.

Image

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Re: Sabres britanniques

Messagepar MASSON Bruno sur 22 Mar 2011, 18:26

Le "galloping at everything" est un commentaire de Wellington après le combat de Campo Mayor, écrit sur la base du seul rapport préliminaire de Beresford, qui n'a (presque) rien vu, car mal placé, et a bloqué tout soutien au 13e dragons légers en pensant qu'il avait été capturé en totalité (sur un rapport du Baron von Tripp). Après avoir lu les rapports du général Long qui le commandait et du général Otway qui commandait le peu de cavalerie portugaise du secteur, il a admis qu'il s'était trompé, mais comme d'habitude, a refusé de retirer son rapport.

Le fait de percuter l'adversaire est en effet une tactique de cavalerie anglaise, où le choc physique est considéré comme un atout au début du combat.
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