Le traité du 3 janvier 1815 (F, UK, A)

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Le traité du 3 janvier 1815 (F, UK, A)

Messagepar REMY Nicolas-Denis sur 12 Juil 2023, 16:51

Voici un traité très important qui va faire financer par l'Angleterre la réorganisation de l'armée française par le Royaume-Uni. C'est un traité secret mais très vite connu qui a faillit causer la guerre entre les vainqueurs de Napoléon en février 1815. Il a fallu l'arrivée de Napoléon pour le rendre caduc.
La base de ce traité est le problème de la Saxe (le royaume, mais aussi des duchés saxons). Le traité a été rédigé dans les trois langues sous la direction de notre cher Talleyrand, encore prince de Bénévent

TRAITE SECRET D'ALLIANCE DEFENSIVE CONCLU A VIENNE
LE 3 JANVIER 1815
ENTRE LA FRANCE, L'AUTRICHE ET LA GRANDE-BRETAGNE
CONTRE LA RUSSIE ET LA PRUSSE


Au nom de la très sainte Trinité,
S. M. le Roi de France, S. M. l'Empereur d'Autriche et S. M. le Roi du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, étant convaincus que les Puissances qui ont à compléter les dispositions du Traité de Paris doivent être maintenues dans un état de sécurité et d'indépendance parfaites, pour pouvoir fidèlement et dignement s'acquitter d'un si important devoir, regardent en conséquence comme nécessaire, à cause de prétentions récemment manifestées, de pourvoir aux moyens de repousser toute agression à laquelle leurs propres possessions ou celles de l'un deux pourraient se trouver exposées en haine des propositions qu'elles auraient cru de leur devoir de faire et de soutenir d'un commun accord par principe de justice et d'équité, et n'ayant pas moins à cœur de compléter les dispositions du Traité de Paris, de la manière la plus conforme qu'il sera possible à son véritable but et esprit, ont, à ces fins, résolu de faire entre eux une convention solennelle, et de conclure une alliance défensive.

En conséquence, leursdites Majestés ont, à cet effet, nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir :
S. M. le Roi de France, M. Charles-Maurice de Talleyrand-Perigord, prince de Bénévent, etc, etc.
S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Bohême et de Hongrie, M. Clément Wenceslas-Lothaire, Prince de Metternich-Winnebourg-Ochsenhausen, etc, etc.
Et S. M. le Roi du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande, le très honorable Robert Stewart, Vicomte de Castlereagh, etc, etc.
Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

Art. 1er. Les H. P. C. s'engagent réciproquement, et chacune d'elles envers les autres, à agir de concert, avec le plus parfait désintéressement et la plus complète bonne foi, pour faire qu'en exécution du Traité de Paris, les arrangements qui doivent en compléter les dispositions soient effectués de la manière la plus conforme qu'il sera possible au véritable esprit de ce Traité.
Si, par suite, et en haine des propositions qu'elles auront faites et soutenues d'un commun accord, les possessions d'aucunes d'elles étaient attaquées, alors et dans ce cas elles s'engagent et s'obligent à se tenir pour attaquer toutes trois, à faire cause commune entre elles et à s'assister mutuellement pour repousser une telle agression avec toutes les forces ci-après stipulées.

Art. 2. Si, par le motif exprimé ci-dessus, et pouvant seul amener le cas de la présente alliance, l'une des H. P. C. se trouvait menacée par une ou plusieurs Puissances, les deux autres parties devront, par une intervention amicale, s'efforcer, autant qu'il sera en elles, de prévenir l'agression.

Art. 3. Dans le cas où leurs efforts pour y parvenir seraient inefficaces, les H. P. C. promettent de venir immédiatement au secours de la Puissance attaquée, chacune d'elles avec un corps de cent cinquante mille hommes.

Art. 4. Chaque corps auxiliaire sera respectivement composé de cent vingt mille hommes d'infanterie et de trente mille hommes de cavalerie, avec un train d'artillerie et de munitions proportionné au nombre de troupes. Le corps auxiliaire, pour contribuer de la manière la plus efficace à la défense de la Puissance attaquée ou menacée, devra être prêt à entrer en campagne dans le délai de six semaines au plus tard après que la réquisition en aura été faite.

Art. 5. La situation des pays qui pourraient devenir le théâtre de la guerre ou d'autres circonstances, pouvant faire que l'Angleterre éprouve des difficultés à fournir, dans le terme fixé, le secours stipulé en troupes anglaises et à le maintenir sur pied de guerre, S. M. B. se réserve le droit de fournir son contingent à la Puissance requérante en troupes étrangères à la solde de l'Angleterre ou de payer annuellement à ladite Puissance une somme d'argent calculée à raison de 20 livres sterling par chaque soldat d'infanterie, et de 30 livres sterling par chaque soldat de cavalerie, jusqu'à ce que le secours stipulé soit complété. Le mode d'après lequel la Grande-Bretagne fournira son secours sera déterminé à l'amiable, pour chaque cas particulier, entre S. M. B. et la Puissance menacée, aussitôt que la réquisition aura eu lieu.

Art. 6. Les H. P. C. s'engagent, pour le cas où la guerre surviendrait, à convenir à l'amiable du système de coopération le mieux approprié à la nature ainsi qu'à l'objet de la guerre, et à régler de la sorte les plans de campagne, ce qui concerne le commandement, par rapport auquel toutes facilités seront données, les lignes d'opération des corps qui seront respectivement employés, les marches de ces corps et leurs approvisionnements en vivres et en fourrages.

Art. 7. S'il est reconnu que les secours stipulés ne sont pas proportionnés à ce que les circonstances exigent, les H. P. C. se réservent de convenir entre elles, dans le plus bref délai, d'un nouvel arrangement qui fixe le secours additionnel qu'il sera jugé nécessaire de fournir.

Art. 8. Les H. P. C. se promettent l'une à l'autre que, si celles qui auront fourni les secours stipulés ci-dessus se trouvent à raison de ce engagées dans une guerre directe avec la puissance contre laquelle ils auront été fournis, la partie requérante et les parties requises entrées dans la guerre comme auxiliaires ne feront la paix que d'un commun consentement.

Art. 9. Les engagements contractés par le présent Traité ne préjudicieront en rien à ceux que les H. P. C. ou aucunes d'elles peuvent avoir, et ne pourront empêcher ceux qu'il leur plairait de former avec d'autres Puissances, en tant toutefois qu'ils ne sont et ne seront point contraires aux fins de la présente alliance.

Art. 10 Les H. P. C. n'ayant aucune vue d'agrandissement et n'étant animées que du seul désir de se protéger mutuellement dans l'exercice de leurs droits et dans l'accomplissement de leurs devoirs comme Etats indépendants, s'engagent pour le cas où, ce qu'à Dieu ne plaise, la guerre viendrait à éclater, à considérer le Traité de Paris comme ayant force pour régler, à la paix, la nature, l'étendue et les frontières de leurs possessions respectives.

Art. 11. Elles conviennent, en outre, de régler tous les autres objets d'un commun accord, adhérant, autant que les circonstances pourront le permettre, aux principes et aux dispositions du Traité de Paris sus-mentionné.

Art. 12. Les H. P. C. se réservent, par la présente convention, d'inviter toute autre Puissance à accéder à ce Traité, dans tel temps et sous telles conditions qui seront convenues entre elles.

Art. 13. S. M. le Roi du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande n'ayant sur le continent de l'Europe aucune possession qui puisse être attaquée, dans le cas de guerre auquel le présent Traité se rapporte, les H. P. C. conviennent que, ledit cas de guerre survenant, si les territoires de S. M. le Roi de Hanovre ou les territoires de S. A. le Prince Souverain des Provinces-Unies, y compris ceux qui se trouvent actuellement soumis à son administration, étaient attaqués, elles seront obligées d'agir pour repousser cette agression comme si elle avait lieu contre leurs propres territoires.

Art. 14. La présente convention sera ratifiée, et les ratifications en seront échangées à Vienne dans le délai de six semaines ou plus tôt si faire se peut.

En foi de quoi, les Plénipotentiaires respectifs l'ont signée et y ont apposé le cachet de leurs armes.

Fait à Vienne, le 3 janvier de l'an de grâce 1815.

TALLEYRAND.
METTERNICH.
CASTLEREAGH

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ARTICLE SEPARE ET SECRET

Les H. P. C. conviennent spécialement par le présent article d'inviter le Roi de Bavière, le Roi de Hanovre et le Prince Souverain des Provinces-Unies à accéder au Traité de ce jour, sous des conditions raisonnables pour ce qui sera relatif à la quotité des secours à fournir par chacun d'eux ; les H. P. C. s'engagent, de leur côté, à ce que les clauses respectives des traités en faveur de la Bavière, du Hanovre et de la Hollande reçoivent leur plein et entier effet.

Il est entendu cependant que, dans le cas où l'une des puissances sus-désignées refuserait son accession, après avoir été invitée à la donner comme il est dit ci-dessus, cette puissance sera considérée comme ayant perdu tous droits aux avantages auxquels elle aurait pu prétendre en vertu des stipulations de la convention de ce jour.

Le présent article, séparé et secret, aura la même force et valeur que s'il était inséré mot à mot dans la convention de ce jour ; il sera ratifié, et les ratifications en seront échangées en même temps.
En foi de quoi, les Plénipotentiaires respectifs l'ont signé et y ont apposé le cachet de leurs armes.
Fait à Vienne, le 3 janvier de l'an de grâce 1815.

TALLEYRAND.
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