Je rebondis brièvement, car oui, je sais aussi que l'on s'éloigne de la période, mais oui c'est vrai qu'il s'agit d'armes se chargeant encore par la bouche, soit comme sous l'Empire... Donc, sur 37 574 fusils ramassés... arrondissons à 36 000 pour la démonstration...
6000 avaient 3 à 10 balles dans le canon, 12000 en avaient 2 et 6000 avaient une charge sans balles. Cela représente quand même 24000 hommes qui ne pouvaient pas tirer et faisaient les gestes mais sans aucun effet sur l'adversaire.
Relativisons.
A supposer que toutes les armes ramassées proviennent de tués ou blessés (ce qui n'est pas sûr, des gens en parfaite santé ayant pu "perdre" ou changer la leur), le nombre de balles dans le canon correspond bien entendu à celles chargées par son propriétaire avant qu'il ne l'abandonne pour l'une ou l'autre raison.
Les 6 000 ayant une charge de poudre et pas de balle signifient que le propriétaire de l'arme n'a pas eu le temps d'achever son chargement... et il sort donc des 24 000 supposés gesticulant pour rien.
Les 12 000 qui avaient deux balles dans le canon, soit ont eu le même sort que les précédents avant d'ajouter inutilement d'autres balles, soit se sont aperçus du dysfonctionnement et jeté leur arme. Dans les deux cas, que ce soit de gré ou de force, ils n'ont pas persisté longtemps dans l'erreur.
Restent les 6 000 "veinards" qui ont eu le temps d'insister jusqu'à dix fois avant d'être convaincus, de l'une ou l'autre manière, d'arrêter.
Cela reste considérable, mais à nouveau relativisé par le fait que beaucoup de soldats, surtout chez les Nordistes ou le taux de renouvellement de la troupe était élevé, n'étaient pas très expérimentés.
Nonobstant, recharger dix fois d'affilée son arme sous le feu ennemi cela force le respect si l'on se rappelle que le faire une fois seulement était déjà un exploit pour les miliciens lors de la Guerre d'Indépendance, où il est vrai ils avaient affaire aux Tuniques Rouges qui ne leur laissaient pas l'occasion de tirer beaucoup plus.
Revenant au premier Empire, rappelons qu'un taux de ratés de 10 % était considéré comme normal, et qu'il était plus élevé au fur et à mesure que baissait la qualité de l'arme, celle du soldat, enfin celle de la poudre, trois paramètres qui atteignent généralement leur paroxysme dans les circonstances extrêmes comme 1812 pour les Russes et 1814 pour les Français, où l'on fait "flèche de tous bois".
Point commun à ces deux exemples, et quelles qu'en soient les raisons, pur esprit de lucre ou même sabotage, on trouva souvent des cartouches dont la poudre était "assaisonnée" (voire remplacée) avec de la sciure de bois et là, forcément, cela marchait beaucoup moins bien !
Diégo Mané