Efficacité des fusils

Tous les sujets relatifs aux guerres de la Révolution et de l'Empire (1792-1815) ont leur place ici. Le but est qu'il en soit débattu de manière sérieuse, voire studieuse. Les questions amenant des développements importants ou nouveaux pourront voir ces derniers se transformer en articles "permanents" sur le site.

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Efficacité des fusils

Messagepar THOMAS Didier sur 30 Jan 2014, 23:04

Bonjour,

j'ai une petite question anodine qui me trotte dans la tête.
celle-ci concerne l'efficacité réelle des fusils lors des combats.
en effet, suite à une étude des fusils ramassés après la bataille de Gettysburg
oui je sais ce n'est pas la même période
sur 37574 fusils à chargement par la bouche ramassés sur le champ de bataille et examinés à l'arsenal de Washington donc on peut considérer que c'est le même type de chargement que dans l'époque qui nous concerne.
6000 avaient 3 à 10 balles dans le canon, 12000 en avaient 2 et 6000 avaient une charge sans balles.
cela représente quand même 24000 hommes qui ne pouvaient pas tirer et faisaient les gestes mais sans aucun effet sur l'adversaire.
est-ce qu'une étude quelconque fait état de remarque de ce genre pour la période de l'empire ?
cela amènerait à reconsidérer l'efficacité réelle des tirs.

bonne recherche à tous.
frisch gewagt ist halb gewonnen
THOMAS Didier
 
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Re: Efficacité des fusils

Messagepar MELCHIOR Thierry sur 31 Jan 2014, 10:30

Bonjour Didier,

Pour ma part, j'ai constaté que, dans les règles de jeu d'histoire, le facteur feu correspond bien à la réalité du terrain.
Un facteur feu moyen correspond à une efficacité d'environ 6 % dans certaines règles.
Dans son étude, Éric Dauriac annonce 1 % d'efficacité (tués et blessés).
On peut admettre que les 5 % d'écart correspondent à l'effet moral.

Si l'aspect psychologique du combat t'intéresse je t'engage à lire les documents suivants :
« Relire Ardant du Picq »
« Études sur le combat », Ardant du Picq.
« Sous le feu… »
« Ce ne sont pas les événements qui troublent le cœur des hommes, mais les jugements qu'ils portent sur les événements. »
Épictète (Stoïcien)
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Re: Efficacité des fusils

Messagepar MANÉ Diégo sur 31 Jan 2014, 14:01

Je rebondis brièvement, car oui, je sais aussi que l'on s'éloigne de la période, mais oui c'est vrai qu'il s'agit d'armes se chargeant encore par la bouche, soit comme sous l'Empire... Donc, sur 37 574 fusils ramassés... arrondissons à 36 000 pour la démonstration...

6000 avaient 3 à 10 balles dans le canon, 12000 en avaient 2 et 6000 avaient une charge sans balles. Cela représente quand même 24000 hommes qui ne pouvaient pas tirer et faisaient les gestes mais sans aucun effet sur l'adversaire.


Relativisons.

A supposer que toutes les armes ramassées proviennent de tués ou blessés (ce qui n'est pas sûr, des gens en parfaite santé ayant pu "perdre" ou changer la leur), le nombre de balles dans le canon correspond bien entendu à celles chargées par son propriétaire avant qu'il ne l'abandonne pour l'une ou l'autre raison.

Les 6 000 ayant une charge de poudre et pas de balle signifient que le propriétaire de l'arme n'a pas eu le temps d'achever son chargement... et il sort donc des 24 000 supposés gesticulant pour rien.

Les 12 000 qui avaient deux balles dans le canon, soit ont eu le même sort que les précédents avant d'ajouter inutilement d'autres balles, soit se sont aperçus du dysfonctionnement et jeté leur arme. Dans les deux cas, que ce soit de gré ou de force, ils n'ont pas persisté longtemps dans l'erreur.

Restent les 6 000 "veinards" qui ont eu le temps d'insister jusqu'à dix fois avant d'être convaincus, de l'une ou l'autre manière, d'arrêter.

Cela reste considérable, mais à nouveau relativisé par le fait que beaucoup de soldats, surtout chez les Nordistes ou le taux de renouvellement de la troupe était élevé, n'étaient pas très expérimentés.

Nonobstant, recharger dix fois d'affilée son arme sous le feu ennemi cela force le respect si l'on se rappelle que le faire une fois seulement était déjà un exploit pour les miliciens lors de la Guerre d'Indépendance, où il est vrai ils avaient affaire aux Tuniques Rouges qui ne leur laissaient pas l'occasion de tirer beaucoup plus.

Revenant au premier Empire, rappelons qu'un taux de ratés de 10 % était considéré comme normal, et qu'il était plus élevé au fur et à mesure que baissait la qualité de l'arme, celle du soldat, enfin celle de la poudre, trois paramètres qui atteignent généralement leur paroxysme dans les circonstances extrêmes comme 1812 pour les Russes et 1814 pour les Français, où l'on fait "flèche de tous bois".

Point commun à ces deux exemples, et quelles qu'en soient les raisons, pur esprit de lucre ou même sabotage, on trouva souvent des cartouches dont la poudre était "assaisonnée" (voire remplacée) avec de la sciure de bois et là, forcément, cela marchait beaucoup moins bien !

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Re: Efficacité des fusils

Messagepar MASSON Bruno sur 02 Fév 2014, 08:07

J'ajouterai aussi a ces soldats ayant perdu leur fusil (mal) chargé ceux, non comptabilisés, qui ont bien chargé leur fusil mais tiré leur baguette-refouloir avec leur charge, se trouvant incapable par la suite de recharger, ainsi que ceux qui auront trop tassé leur charge et dont l'arme a explosé, tuant ou blessant gravement le tireur...

Mais ne pas oublier que sur cette période postérieure, la plupart des armes à chargement par la bouche ont abandonné les affres de la mise à feu par silex pour passer à la percussion, assurant presque la mise à feu de la charge principale.

on peut aussi ajouter que, s'agissant de troupes très peu expérimentées dans un champ de bataille très irrégulier de la guerre civile américaine, le fait de recharger son fusil ne veut pas dire qu'on a tenté de tirer avant !

je m'explique :

-dans une troupe entraînée et réglée, le feu et le rechargement se font sur ordre, il y a très peu de feu à volonté, et la confiance entre l'encadrement et la troupe est présente.

-dans une troupe de miliciens sans entraînement, les ordres sont donnés plus au jugé, et lors du feu, une bonne partie de l'unité peut ne pas être prête à tirer (mal placé, pas de cible, pas entendu l'ordre...) si le feu continue, pas de soucis, le soldat ne recharge pas et tire ensuite (ou essaie). Mais en cas de mouvement, il peut s'écouler plusieurs minutes avant le prochain feu, et la recrue peut recharger par imitation, ou par obligation sous l"encouragement fort" de son sergent ou de son caporal, qui voit ce qui lui semble un "ptit gars déboussolé qui n'obéit pas à l'ordre", ou ne pas se rappeler s'il a tiré ou pas, etc...

Typiquement une réaction amenée par le stress, l'adrénaline, la peur et le bruit.
MASSON Bruno
 


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