Nos amis d'Amérique

Tous les sujets relatifs aux guerres de la Révolution et de l'Empire (1792-1815) ont leur place ici. Le but est qu'il en soit débattu de manière sérieuse, voire studieuse. Les questions amenant des développements importants ou nouveaux pourront voir ces derniers se transformer en articles "permanents" sur le site.

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Nos amis d'Amérique

Messagepar BOUTTET Denis sur 11 Mar 2013, 16:05

Bonjour,
Un autre sujet qui ne devrait pas forcément passionner les foules mais pour lequel j'ai un petit faible.

Au delà des quelques points suivants, je ne connais pas grand chose à la contribution des Amérique aux guerres de l'Empire :

- cession de la Louisiane en 1803,

- guerre de 1812-1814,

- timide attaque de bâtiments anglais par des navires américains au large de la péninsule ibérique.

Je suis donc à la recherche de pistes de tout ordre de la (non) collaboration de ces deux nations contre un adversaire commun.

Merci d'avance.

Denis
Ils sont fous ces bretons, ils brassent la bière à l'eau de mer ...
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Re: Nos amis d'Amérique

Messagepar AUGER Vincent sur 04 Avr 2013, 06:58

Je manque de références précises mais il me semble difficile de parler de collaboration.

La position officielle des Etats Unis vis à vis du conflit est en effet une stricte neutralité qui implique, selon eux, le droit de commercer avec les deux belligérants.

Le blocus continental de Napoléon ne peut malheureusement pas grand chose contre le commerce entre les Etats Unis et l'Angleterre.
Le blocus maritime des Anglais est par contre plus contraignant pour les Américains et c'est suite à une série d'arraisonnements de navires marchands que les Etats Unis déclarent la guerre en 1812 et se retrouvent donc alliés de fait avec la France.

Une alliance officielle aurait toutefois impliqué le risque pour les Etats Unis de partager le sort de la France en cas de défaite et c'est un danger que leur diplomatie s'est bien évertué à éviter.

Au mieux, on peut parler du vieux principe que "les ennemis de mes ennemis sont mes amis".
Ludiquement votre




Vincent
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Re: Nos amis d'Amérique

Messagepar MASSON Bruno sur 05 Avr 2013, 05:43

ultra-rapidement, un aperçu de l'état politique US.

Il faut garder à l'esprit que la guerre d'indépendance est toute proche, donc le ressentiment Anti-anglais est très fort, mais plutôt comme un complexe d'infériorité entre frères aîné-benjamin, et certains états n'ont pas encore admis la scission avec les îles britanniques, surtout en Nouvelle-Angleterre.

Aussi, le pouvoir central est très faible en ce qui concerne les affaires internes, voir locales, c'est plus un rassemblement d'états ayant une action commune en cas de guerre qu'un vrai état. Le changement survient lors de la guerre de sécession, où la guerre devient une affaire interne.

de même qu'il n'y a pas d'armée permanente, il n'y a pas de flotte de guerre, même si les US ont inventé la "super-frégate", ils n'ont rien ou presque capable de tenir tête à un vaisseau de guerre.
MASSON Bruno
 

Re: Nos amis d'Amérique

Messagepar MASSON Bruno sur 05 Avr 2013, 18:12

pour situer les points d'achoppements anglo-étasuniens, il faut prendre en compte deux états de faits permanents avant, pendant voir après la période qui nous intéresse.

Du côté Anglais, la Navy est toute-puissante, et fait ce qu'elle veux, sauf le dimanche, où elle fait ce qu'il lui plaît.
Y compris user et abuser du droit de fouille/recherche, qui lui permet d'arraisonner en pleine mer n'importe quel navire ami ou neutre (on ne parle pas des ennemis) et de le fouiller de la cale au huniers à la recherche de "déserteurs, ex-mutins, biens appartenant aux nations ennemies et assimilées, etc..." (dans ce dernier cas, le navire peut être déclaré de bonne prise). les seuls navires ayant une certaine immunité sont les négriers, tout d'abord parce que c'est plutôt déprimant, ensuite parce qu'à part le "bois d'ébène" (qui est trop encombrant), il n'y a pas grand chose à confisquer à bord.
en cas d'abus de pouvoir, il faut en passer par la justice anglaise et l'Amirauté, qui donnent raison en général aux plaignants, mais pas tout de suite... Et la Nation qui pâtit le plus de ces recherches, c'est les US, vu que c'est elle qui a la plus grande flotte océanique neutre de la période.....

Du côté Zétats-Zunis, très peu de choses ont changé depuis la dernière vague de piraterie du XVIIIe, et les marchands portuaires sont toujours friands de marchandises importées, qu'elles viennent de la cale d'un marchand patenté, d'une méchante barcasse armée aux affiliations aussi louches que son équipage, ou d'un Corsaire parfaitement déclaré. Pendant la période Révolutionnaire, les forces Anglaises essaimées sur les iles des caraïbes auront autant le but de capturer des établissements sucriers que d'éradiquer des nids de corsaires, et bien des chasses aux corsaires se finiront...dans l'avant -port d'une ville de Floride ou du Sud, où la Navy n'ose pas quand même pénétrer (il y a des limites aux provocations armées, surtout quand en face leurs canons sont plus gros et derrière des murs de pierre) Le temps que la protestation arrive aux dirigeants du lieu, le navire chassé a eu le temps de filer à la Malouine avec un stock de vivres frais et d'eau douce, et plus léger de sa cargaison de prise. Ne parlons pas des histoires de navires battant pavillon Américain face aux frégates Anglaises, et Français ou Espagnol face aux marchands de la même nation, ce sont des allégations sans le moindre fondement.
MASSON Bruno
 

Re: Nos amis d'Amérique

Messagepar MASSON Bruno sur 05 Avr 2013, 18:31

parlons ensuite du lieu d'affrontement terrestre le plus direct et le plus évident entre ces deux antagonistes, à savoir la côte Nord-Est du continent Nord-Américain.

au Nord (non, c'est pas les Corons), donc du côté Anglais, il y a une forte population francophone plutôt pauvre (car catholique, ou calviniste), pas franchement heureuse du joug Anglais mais sans illusions sur le sort qui les attend sous administration Etazunienne (changer la couleur du fouet n'est pas franchement glamour quand tu reçoit les coups de toutes façon). Etant donné que le gouverneur Anglais est forcé de se la jouer "à la Cool" vu son manque total de troupes capable de mater le moindre début d'insurrection, ils seraient même plutôt pour le statut-quo... Mais les milices levées dans cette partie du Canada auront toujours des taux de désertion énorme.

Au Sud, du côté de l'Union, on trouve les colonies de peuplement les plus anciennes, et le plus grand nombre d'anciens Loyalistes qui n'ont pas pu ou voulu passer le fleuve. ce dernier, dans ce pays sans routes est une voie de communication très importante, tant transversale que vers l'extérieur, qui en cas de guerre va se trouver impraticable et menacer de ruine toute une partie de la classe dirigeante qui vend son blé, son orge, etc... au canada voire en Angleterre. Les représentants de ces états vont donc combattre toute résolution menaçante envers l'Angleterre jusqu'au bout, et vont même menacer de faire sécession et de s'opposer par la force à toute troupe pénétrant sur son territoire dans le but d'attaquer le Quebec. On ne se battra donc pas au Nord-Est....
MASSON Bruno
 

Re: Nos amis d'Amérique

Messagepar MASSON Bruno sur 20 Avr 2013, 04:55

une petite conclusion sur le double blocus européen.

il est erroné de le penser comme un blocus moderne, avec arraisonnement des navires en haute mer et surveillance des ports de commerce par des navires de guerre, ça ce n'est vrai que pour les ports de guerre, les autres sont trop nombreux pour la Navy, et les Français n'ont rien pour le faire.

ce blocus est plus un "refus d'escale", c'est à dire que tout navire ayant fait escale en port ennemi est susceptible d'être fouillé et déclaré de bonne prise si les marchandises à bord ou les documents présents prouvent qu'il y a fait affaire, ce qui permet tout de même une contrebande effrénée de caboteurs à travers la Manche, dont un des but principaux est d'approvisionner la cour Impériale Française en étoffes Anglaises, avec la bénédiction de l'amirauté Anglaise qui laisse faire. On ira même dans l'entourage de Joséphine jusqu'à fournir aux contrebandiers des sauf-conduits Impériaux pour que les gendarmes ne regardent pas le contenu des ballots déchargés. La remontée de l'information à Boney déclenchera une colère homérique qui ralentira un peu le trafic pour un temps.

du côté Américain, le congrès sortira un édit interdisant aux navires US de faire escale en Angleterre après avoir touché en France, et vice-versa, ce qui permettra à Napoléon de faire main-basse sur toutes les cargaisons Américaines alors au port, en affirmant benoîtement à l'ambassadeur US qu'il ne faisait qu'aider son pays à faire respecter ses lois.

malgré tout ça, l'état d'hostilité permanente entre les US et le Royaume Uni ne fait pas de bien au commerce mutuel, qui est énorme, et donc en 1812, les deux pays ont fait un pas vers l'autre et tout semble pouvoir être réglé, quand le parti des Faucons du congrès prend prétexte d'un incident de fouille en mer pour profiter du fait que l'adversaire Anglais est pleinement occupé en Espagne, et que les Français le sont à l'Est de l'Europe, pour tenter une conquête rapide du Canada, dont la garnison se limite à 3 bataillons de réguliers (2/1st, 1/41st, 1/104th) des fencibles et des miliciens, soit moins de 10 000 hommes dispersés sur un terrain grand comme 5 à 6 fois la France, et qui n'ont aucune chance d'être renforcés à court terme. De son côté, le congrès pense disposer d'environ 100 000 hommes plus ou moins entrainés, dont le nombre palliera certainement le manque d'ardeur.

Il s'agit ni plus ni moins que d'un Hold-Up, qui va lamentablement échouer à plusieurs reprises par l'incurie et l'amateurisme des généraux engagés. (ceux d'en face ne sont pas mieux, mais étant par construction pratiquement toujours confiné à une défense statique, leurs erreurs crasses, non exploitées par l'adversaire, n'auront que peu de conséquences)

en 1814, la guerre se finit à la satisfaction générale, les Américains ayant subit des pertes de prestige importantes en interne du fait des raids côtiers impunis menés en coopération par la marine et l'armée du Roi, et l'Angleterre ayant vu son trésor continuer à se vider malgré la paix avec la France. Rien n'est modifié aux positions atteintes en 1812 juste avant la guerre, si ce n'est que le Blocus n'existe plus bien sûr, mais les marchés Français sont tous ouverts aux Anglais du fait de l'Anglophilie des Bourbons, et le reste de l'Europe est exsangue.
MASSON Bruno
 


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